Mirliton Matin : la rechute ! (M.M., volume 3)
UN
Mirliton Matin, rubrique « nos retraités sont actifs » ! Un ex-maître nageur prend désormais soin des noyers… Leur fait-il le bouche-à-bouche ?
La retraite est parfois le moment d’inverser
La vapeur
Abattre sa routine, et envoyer valser
Ses valeurs
Pour tendre enfin, à son miroir, à son passé,
Son majeur.
Ainsi de ce métier, trop longtemps exercé :
Professeur
De natation – autrement dit, sans finasser,
Maît’nageur !
Profession admirable et souvent, on le sait,
De grand cœur,
Car couronnée d’un noble et superbe énoncé :
« Sauveteur » .
Dominique pourtant s’en est débarrassé
Sans douceur.
Porter ce sacerdoce, il en avait assez !
Cet honneur
Tout humble et tout humide, comme il le haïssait !
Voici l’heure
De cesser de sauver et plutôt de bosser
En cueilleur,
De sortir du bassin et de se rehausser
Vers les fleurs.
Pas n’importe lesquelles : celles qui ont poussé
En hauteur,
Aux branches des noyers ! Dominique se sait
Nuciculteur.
« Noyers, ah, fleurissez ! Noyés, disparaissez ! »
Quel farceur !
Reconversion rêvée, culot récompensé
Producteur
Vie à la noix que Dominique s’est tracée
Bien meilleure
Pied de nez au destin, jeu de mot balancé
Au malheur !
À Dominique, tous nos vœux sont adressés
Au bonheur !
Faut-il tirer une morale nuancée ?
Et ta sœur ?
DEUX
Mirliton Matin, rubrique 30 millions d’amis et de nuisances sonores ! Une chatte britannique bat le record du ronron tonitruant avec 54,29 décibels.
Le doux ronron du chat le soir au coin de l’âtre ?
C’est bon pour le moral, conseillent les psychiatres.
La ronron-thérapie consol’ du ciel grisâtre.
Pourtant point trop n’en faut ! Et l’on pourrait débattre
Du taux de décibels après quoi : faut décroître
Sinon l’effet s’inverse et l’on vire acariâtre.
Le record actuel est anglais : 54.
Quel boucan ! Mon avis : ce matou, qu’on le châtre !
(Non, c’est une femelle… En ce cas, qu’on l’emplâtre.)
TROIS
Mirliton Matin, rubrique amusons-nous avec Google les jours de pluie ! (sur une idée de Marie Mazille)
Méthode :
1) Proposer au moteur de recherche Google un début de question, en l’occurrence : « Pourquoi faut-il… »
2) Lire toutes les solutions suggérées par le remplissage automatique de Google qui devine les mots avant même que vous ne les ayez pensés, vous connait mieux que vous ne vous connaissez, et n’aime rien tant que finir vos phrases à votre place.
3) Mirlitonner à loisir et traduire en vers délicats cette guirlande d’angoisses, manifestement communes.
Pourquoi faut-il optimiser
La gestion de chaîne logistique ?
Pourquoi faut-il sans plus tarder
Investir dans le photovoltaïque ?
Pourquoi faut-il économiser
Chaque goutte des ressources hydriques ?
Pourquoi faut-il sans hésiter
Réparer les feins hydrauliques ?
Pourquoi faut-il savoir compter
Quand on offre des roses qui piquent ?
Pourquoi faut-il imaginer
Sisyphe heureux, philosophique ?
Pourquoi faut-il trier ses déchets,
Est-ce vraiment écologique ?
Pourquoi faut-il les lentilles rincer
Quelle en est l’exacte technique ?
Pourquoi le passeport est obligé
Pour visiter les Britanniques ?
Pourquoi respirer par le nez
Même quand on est en public ?
Pourquoi faut-il obliger à voter
Pour s’impliquer en politique ?
(Il parait qu’c’est ce qui se fait
Outre-Quiévrain, dans la Belgique)
Pourquoi faut-il se faire enlever
Les dents de sagesse en clinique ?
Pourquoi faut-il manger du lait
Quand on prend des antibiotiques ?
Pourquoi garder les yeux fermés
Pendant un baiser romantique ?
Puis, pourquoi faut-il uriner
Après un quart d’heure érotique ?
Mais pourquoi faut-il transpirer
Quand on est fiévreux, frénétique ?
Et pourquoi faudrait-il travailler
Victimes de l’idéologique ?
Pourquoi faut-il sans cesse penser
Alors que Google est si pratique ?
QUATRE
Mirliton Matin, rubrique le vent de l’amour ! (fait divers et mirliton monorime)
Pour la Saint Valentin je t’offrirai mon cœur
Et je m’apprêterai pour toi mon âme sœur.
Toi, que m’offriras-tu ? Un gros bouquet de fleurs ?
Un dîner aux chandelles, un coffret de douceurs ?
Un bijou chatoyant de feux et de couleurs
Et qui révèlerait de mes joues la rougeur ?
Tu me courtiseras en flattant ma valeur
Tu seras mon héros, mon roi, mon empereur
J’attendrai ce moment avec grâce et ferveur
Ce serait bien de joie si me venaient des pleurs
Alors toute la nuit on jouerait au docteur
Puis nous reposerions en mêlant nos chaleurs
Comme à la fin d’un conte, ainsi nous vivrons heur-
Eux et nous aurons beaucoup de successeurs.
Mais attention à toi si jamais par malheur
Tu oubliais le jour, le mois, la date et l’heure !
Faut être con, indifférent, ou Alzheimer !
Imbécile ! Abruti ! Salaud ! Crétin ! Loser !
Je t’en foutrai des Valentins baratineurs !
Je te castagnerai à coups d’aspirateur !
L’outil du grand ménage et de l’instinct vengeur !
J’aspirerai ta rate et la cuirai au beurre
J’aspirerai ton foie, riant de tes douleurs
J’aspirerai tes yeux découpés au cutter
J’aspirerai ta queue, la jetant au mixeur
Et pour finir j’aspirerai ton vilain cœur.
CINQ
Mirliton Matin, rubrique loisirs créatifs ! (diversion existentielle et mirliton monorime)
Le puzzle est en miettes, je suis seul face à lui.
Vingt mille pièces en vrac et je le reconstruis.
Je commence le jour, je continue la nuit.
Puis tous les autres jours avec soleil ou pluie.
Il est mon obsession, mon sablier enfui
Il s’accroît à mesure que mon temps réduit
Il est l’incarnation de ce qu’au fond je suis
Moi aussi en morceaux, j’assemble mon ennui.
SIX
Oh oh, c’est quoi cette odeur ?
On vient d’observer près de Nancy l’éclosion de la plus grosse fleur du monde ! Fleur rare et fragile mais disproportionnée, qui s’appelle Pénis de titan, et qui pue, mais qui pue, que c’en est affreux-affreux. Il n’en fallait pas davantage pour ressusciter brièvement et en pleine canicule Mirliton Matin. (Pour mémoire, les annales de MM, média éphémère, sont consultables ici.)
Une (autre) charogne
Hommage à Charles Baudelaire
Surnommée « Pénis de titan »,
La plus énorme fleur au monde
N’en éclot que tous les cent ans
Dans une puanteur immonde.
L’Amorphophallus titanum
(De son aimable nom latin)
Déploie un répugnant arôme
La protégeant des importuns.
Trois mètres, un quintal… La géante
Schlingue à mort la viande pourrie !
Et cette exhalaison puissante
Est sa seule coquetterie.
En disciples de Baudelaire,
Nous sentons cette fleur du mal
Empoisonner notre atmosphère,
Toxique ainsi que sont les mâles.
Tout en voilant son nez, le fier
Botaniste-accoucheur se navre
Que sa fleur née dans la bruyère
Ait un autre surnom : « Fleur-cadavre » .
Aussi retenons « Pénis » ! Et la leçon :
Chers messieurs, la taille ne fait pas tout.
Mieux vaut minuscule qui fleure bon
Que titanesque refoulant l’égout.
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