Auto da fe
Faut-il tuer les professeurs de lettres en lycée à coups de couteau ?
Ben non.
Faut-il brûler le Coran ?
Non plus.
Puisqu’il ne faut pas brûler les livres, en général. De même qu’il ne faut pas tuer les gens à coups de couteau, en général.
Encore faut-il savoir pourquoi il convient de ni brûler les livres ni égorger les professeurs.
Il ne faut ni brûler les livres ni égorger les professeurs, parce qu’ils sont détenteurs d’une parole humaine.
Oui, la vraie raison de l’interdit est là, dans l’humanité, pas dans une quelconque divinité : égorger un professeur est un assassinat, mais pas une mission sacrée ; brûler un livre est une imbécilité, mais pas un blasphème.
Préservons les livres parce que les livres sont des paroles d’humains et non parce qu’ils sont la parole de Dieu (alors ça, le coup de la « parole de Dieu », c’est autre chose, ce sont des histoires que les humains se racontent, peu importe qu’elles soient vraies ou fausses, les histoires sont toujours des paroles d’humains, respectables en tant que telles, il ne faut ni les brûler, ni les revendiquer pour brûler autre chose).
Les humains qui parlent sont infiniment précieux, irremplaçables, chacun est unique.
Les livres sont sensiblement moins précieux, puisqu’ils sont imprimés en nombre et donc aisément remplaçables (le nombre de Coran circulant à la surface de la terre est estimé à trois milliards d’exemplaires, la belle affaire si l’un d’eux brûle, c’est juste une imbécilité, rien de bien grave).
Parmi les livres précieux : les dictionnaires d’étymologie.
« Autodafé » , mot qui désigne la destruction par le feu, et par extension l’élimination sacrificielle et en public, que ce soit des humains eux-mêmes ou de leur parole imprimée dans les livres, a été introduit dans la langue française au XVIIe siècle, via le portugais et l’espagnol, et a vécu son âge d’or lors de l’Inquisition espagnole. Sa source est bien sûr latine : actus fidei. Un acte de foi. Car c’est la foi qui pousse à agir. À brûler les livres et à couper les gorges. Dieu nous garde des actes de foi.
Bonjour mon frère,
Je viens de lire ton texte, dont le mot clé c’est l’adjectif « humain » ! Merci mon frère, nous en parlerons de vive voix !
Ton frère humain !