Ce soir à 21h, je joue avec mes camarades de Micromegas devant le musée de l’eau, Pont-en-Royans, Drôme. Hélas, en arrivant sur place j’ai la mauvaise surprise de constater que des terroristes d’extrême gauche en ont souillé la façade avec leurs slogans extrémistes (document ci-dessus). Vivement qu’un peu d’ordre et d’autorité dans ce pays mette un terme aux agissements de ces dangereux individus radicalisés. Le fascisme de gauche ne passera pas !
Puis : merci à Laurent Vigne (tiens tiens ce nom me dit quelque chose) pour m’avoir durant le concert tiré le portrait ainsi que celui de l’orchestre.
Vu ce soir Vincent doit mourir de Stéphan Castang, avec Vimala Pons qui est ma préférée actrice, et Karim Leklou qui pourrait être mon préféré acteur si j’avais ce genre de chose, un préféré acteur. Film génial ! Film très onirique c’est-à-dire parfaitement évident tout en étant parfaitement mystérieux. Film « Kafkaïen » dans le sens où Kafka éclatait de rire tout seul en lisant à haute voix ses fables terrifiantes. Film paranoïaque de haute volée, qui dit la vérité par la trouille, tel Le Locataire de Polanski, Les Chiens de paille de Peckinpah, Bug de Friedkin, ou à peu près tout John Carpenter. Mais surtout film archi-contemporain : il donne à sentir ce monde incompréhensible où il vaut mieux rester confiné, ce monde où il faut éviter à tout prix le contact visuel pour ne pas courir le risque de l’agression, ce monde où l’on ne supporte plus son prochain, ce monde où la méfiance est le dernier mot des rapports sociaux individualistes et libéraux, ce monde où la violence mortelle de tous contre tous peut éclater à tout instant, c’est bien notre monde, il n’y en a pas d’autre. Film éminemment politique, en somme.
II
Vu aussi le saisissant reportage sur Arte, La jeunesse n’emmerde plus le Front national, qui permet d’accompagner un groupe de jeunes militants du RN, de 17 à 25 ans, jusqu’à un meeting de leur rock star Jordan Bardella. Les laisser parler, tâcher de comprendre ce qui se passe, de comprendre leurs raisons, puisqu’il faut leur laisser ce crédit, ils ont leurs raisons, ils sont rationnels. On écoute ces jeunes gens et ce qui est affolant c’est que sur bien des points on ne peut pas leur donner tort. « Personne ne fait rien pour nous, on veut reprendre en main notre destin » , « On est délaissés par la classe politique qui est déconnectée » , etc… comment ne pas contresigner. Les jeunes se ruent sur le RN tout simplement parce que personne d’autre dans la classe politique ne s’adresse à eux ! Ce n’est pas en trois semaines qu’on pourrait redresser ça, mais en une génération, 20 ans au moins… Voilà : c’est désespérant, c’est flippant, c’est révoltant, mais « c’est normal » comme le disaient Brigitte Fontaine et Areski. Que faire ?
III
Ces jours-ci je remâche une puissante image employée par l’écrivain Terry Pratchett (1948-2015) durant une interview, pour décrire son état d’esprit depuis qu’il se savait condamné. Pratchett est mort huit ans après après avoir appris que la maladie d’Alzheimer l’habitait. Il a vécu huit ans à se savoir foutu, huit ans à se sentir partir jour après jour, huit ans de délabrement inexorable, huit ans de sursis ou bien de supplice très atroce, selon le point de vue. Il dit ceci (je cite de mémoire, je trahis sans doute) :
C’est comme être coincé dans l’habitacle d’une voiture pendant un accident mortel, mais un accident prodigieusement lent. Des années passent entre le moment où l’on voit le platane dans le virage, et celui où le platane nous broie dans le métal, des années à le voir se précipiter chaque seconde vers nous sans pouvoir faire le moindre geste pour l’éviter.
Outre que cette image est difficilement surpassable pour exprimer le sentiment tragique en général, elle me hante aujourd’hui en raison d’un platane très précis, très concret, que nous voyons tous dans le virage. Nous n’avons pas huit ans mais à peine trois semaines avant de nous le prendre dans la gueule. Que faire pendant ces trois semaines ? Rien, comme si on avait Alzheimer Certains tentent des choses tout de même, bougent encore dans l’habitacle, envoient des signes, et je salue leurs initiatives. Je salue ici l’initiative du poète Yves Béal. Chagriné que son petit village (Saint-Didier-de-Bizonnes, 318 âmes) ait voté, comme la France, massivement pour le RN, Yves a décidé d’écrire à chacun de ses 317 concitoyens. Il a glissé dans chaque boîte aux lettres du village : – non seulement un poème (hélas les poètes ne sont pas les derniers à douter de l’efficacité didactique de leur poème) ; – non seulement un rappel historique sur le passé de ce parti qui roule des mécaniques, et dont il est faux de dire qu’il n’a jamais été au pouvoir puisque les fondateurs du FN étaient très proches des cercles de pouvoir entre 1940 et 1944 (hélas ce simple bon sens n’est plus de mise à l’heure où le platane « dédiabolisé » et cachant ses racines est si proche que l’on peut voir le grain de son écorce) ; – mais aussi, et peut-être surtout, un topo sur l’activité législative récente du RN que je reproduis ci-dessous :
Le RN prétend défendre le peuple, les gens de peu, les pauvres, les déclassés, les exploités, les galériens. Or leurs positions dans l’hémicycle prouvent qu’ils ont systématiquement voté CONTRE les dominés, et en faveur des dominants. Tandis que les vieilles positions de principe humanistes, genre « le racisme c’est mal » n’atteignent désormais plus leur cible, c’est cet argument-là, « au portefeuille » qui pourrait avoir in extremis les meilleures chances de toucher sa cible : ô vous les misérables, qui avez été abandonnés (c’est un fait) par la classe politique depuis des décennies, croyez-vous vraiment que votre vie va sensiblement s’améliorer lorsque ce parti-là sera aux affaires ? Ben, non. Vous êtes en train de vous faire arnaquer. Vous imaginez mettre un coup de pied dans la fourmilière « politicienne » à bonnes paroles et belle cravate mais vous en êtes la dupe pure et simple.
La scène la plus célèbre du Dernier tango à Paris (Bernardo Bertolucci, 1972) est celle où Marlon Brandon impose à Maria Schneider une sodomie, lubrifiée au beurre. Ce viol a beau être simulé (on pourrait dire viol de cinéma comme on dit baiser de cinéma, mais mieux vaut encourager la culture du baiser que la culture du viol), il est redoublé en abyme : l’actrice n’avait pas été prévenue de ce rebondissement avant la prise, le réalisateur-manipulateur cherchant à saisir sur pellicule la réaction « authentique » de sa marionnette à la violence de la situation. Mission amplement accomplie : le film est aussi pénible à regarder qu’un snuff movie. Je dis ça, mais je n’ai jamais vu de snuff movie, simplement j’imagine – et la sale idée que je m’en fais provient de ce que le Dernier tango à Paris a imprimé sur ma rétine. Cette scène a marqué pour toujours Maria Schneider (morte en 2011) et sa carrière. Je me souviens d’une interview télévisée tardive de l’actrice où elle racontait qu’elle ne pouvait s’asseoir dans un restaurant sans qu’un garçon ne dépose sur la table, en ricanant, une plaquette de beurre. Elle portait durant cette interview des lunettes noires qui cachaient ses larmes. Et bien sûr, pendant les années voire les décennies qui ont suivi le foutu Tango, le milieu du cinéma ne lui a proposé que des rôles dénudés, des rôles de petites salopes bonnes à enculer. Raconter cette histoire atroce est indéniablement utile, et bienvenu en notre époque metoo où les actrices, porte-paroles de toutes les femmes, ne veulent plus subir les violences que leur imposent les hommes. Notre époque est aussi celle où la mécanique de la « réputation » , si archaïque pourtant, est enfin analysée de façon adéquate et urgente par Laure Daussy (cf. ici) : ce sont les fantasmes et les pratiques des hommes, dont l’impunité est favorisée par la culture patriarcale, qui fabriquent pour leur propre usage le mythe de la fille facile. Le principe, élémentaire, de la réputation est qu’il suffit de violer une fille pour qu’elle devienne violable, et pour toujours ; processus qui fonctionne également devant une caméra, la femme (l’actrice) devenant coupable d’un crime dont elle était la victime. Plus on racontera l’histoire de Maria Schneider, plus on aura une chance d’aider les femmes violées à être entendues et crues, aidées plutôt que soupçonnées d’y être-un-peu-pour-quelque-chose. Pourtant… Je sors du cinéma, j’ai vu Maria de Jessica Palud, qui me laisse un goût plutôt amer. Ce biopic, où le rôle-titre est tenu par Anamaria Vartolomei (vue autrefois dans un autre rôle difficile et nécessaire, L’événement d’après Annie Ernaux), est centré autour du tournage du Tango, mais n’ajoute finalement en 1h40 que peu de choses, en termes de compréhension comme en termes d’émotion, à la très fulgurante interview où Maria racontait en ravalant ses sanglots l’anecdote du garçon de restaurant. Maria, film sans aucun doute féministe, est en fin de compte aussi désagréable à regarder que le film original, aujourd’hui ringard, de 1972, ce film d’homme(s), qui raconte l’histoire d’un homme, le fantasme d’un homme, la dépression et la noirceur d’un homme vieillissant qui abuse et instrumentalise une très jeune fille. Dans Maria, l’interminable reconstitution du tournage de la scène à la plaque de beurre place paradoxalement le spectateur tout autant dans une position de voyeur, snuff movie au carré, comme si de la pornographie reproduisait de la pornographie pour dénoncer la pornographie. Ou, pire encore, comme si Maria Schneider qui toute sa vie a tenté de ne pas être réduite à cette seule scène, y était encore une fois assignée, et résumée. En revanche, c’est lorsque Maria s’éloigne de sa scène originelle que la cinéaste trouve des moyens saisissants de traiter son sujet. La séquence, opportunément choisie pour illustrer l’affiche du film, où Maria Schneider est bombardée par les flashs des photographes (tous des hommes) en dit largement plus long, et avec un pas de côté plus intéressant, que la reproduction frontale du viol : la violence dure longtemps après les faits, elle est reconduite dans la lumière et le silence (au cinéma on dit Lumière… Silence… Ça tourne). Idem la scène pathétique où Maria, déglinguée par la drogue, fait du raffut en pleine nuit devant chez son oncle. Elle interpelle le voisin réveillé, sorti sur son balcon : « Ne me regarde pas ! » Quelle phrase terrible à prononcer pour une actrice. Surtout, je relève in extremis le discret hommage que rend Maria à Jacques Rivette. Dans l’une des scène finales, Maria Schneider se trouve à nouveau en promotion, cette fois-ci pour Merry-go-round (Jacques Rivette, 1981). Elle semble avoir tourné la page du Tango puisqu’elle déclare en souriant : « J’ai adoré travailler avec cet homme. » Oui ! Voilà selon moi la principale leçon à retenir, leçon de joie et de liberté. Si l’on se penche sur le cinéma des années 70, laissons donc moisir Bertolucci dans son recoin sépia, et redécouvrons Rivette, redécouvrons en permanence et sans relâche à quel point il était moderne. Sans même remonter jusqu’à La Religieuse (1967) qui évidemment dénonce à la suite de Diderot l’oppression des femmes, revoyons L’amour fou (1969), ce récit de l’émancipation d’une femme poussée à la folie par la vie conjugale, et surtout Céline et Julie vont en bateau (1974), sûrement le film le plus féministe que l’on puisse imaginer, du moins réalisé par un homme, prototype de tous les films suivants de Rivette, dans sa méthode comme dans sa manière de faire des femmes des sujets et non des outils, des partenaires (de création) et non des fantasmes. Comme a dit Judith Godrèche en citant Céline et Julie lors de la dernière cérémonie des Césars :
– Céline : Il était une fois. – Julie : Il était deux fois. Il était trois fois. – Céline : Il était que, cette fois, ça ne se passera pas comme ça. Pas comme les autres fois.
Post-scriptum. Suite à la publication de l’article ci-dessus sur Fichtrebouque, un(e) certain(e) Afton Berg a écrit le commentaire suivant :
Votre chronique est super, mais au final vous finissez par valoriser un homme alors que votre sujet était une femme! Le patriarcat revient tjrs nous attraper, même qd on a les meilleures intentions! On est pas sorti de l’auberge comme on dit!
Mon sang n’a fait qu’un tour :
Pas d’accord. Ce qu’il faut abolir (et le rappeler sans relâche façon « Delenda Carthago » ), c’est le patriarcat, pas les hommes. Je ne crois pas, en faisant l’éloge d’un homme, un homme qui justement a offert une voie de narration fertile en termes d’alternative au patriarcat, ni rattraper celui-ci ni me faire rattraper par lui. Les femmes écrivent des livres et réalisent des films sans que chacune ne soit l’exception qui confirme la règle façon schtroumpfette, youpi, il était temps, lisons-les, voyons-les, écoutons-les. Pour autant toutes les oeuvres des hommes ne sont pas « patriarcales ». Je considère parfaitement stupides les postures radicales telles celle d’Alice Coffin déclarant fièrement « ne plus lire les livres écrits par des hommes » . C’est un excès contre-productif, et un révisionnisme. Un exemple très simple : l’un de mes écrivains préférés, toutes catégories confondues, est Annie Ernaux, justement essentielle pour appréhender la voix des femmes. Or lorsqu’elle cite ses influences, les lectures qui lui ont donné envie d’écrire, on y trouve pêle-mêle des femmes (Beauvoir, Woolf, Etcherelli) et des hommes (Flaubert, Bourdieu, Perec). Faudrait-il, sous couvert de « féminisme » lire les unes et jeter à la poubelle les autres ? Ce serait absurde. Chacune et chacun ont fait notre histoire, celle d’Ernaux, celle de la pensée et celle des lettres. (1) De surcroît, favoriser une femme plutôt qu’un homme au seul titre qu’elle est une femme pourrait dangereusement conduire à plébisciter des femmes qui soutiennent les piliers patriarcaux. Dans le champ du cinéma : vive Varda, méfions-nous de Maïwenn. Dans le champ politique c’est encore pire, et plus évident : il n’est pas très anti-patriarcal de soutenir les deux héritières Le Pen, Giorgia Meloni, Thaïs d’Escuffon, Ludovine de la Rochère ou bien les Caryatides, Les Némésis, les Brigandes, et autres malfaisantes. Mais merci pour la stimulation intellectuelle de bon matin !
(1) – Ajout, août 2024. Entre temps je suis tombé sur un autre exemple tellement fulgurant qu’il en est presque caricatural. Alison Bechdel, autrice de bandes dessinées, féministe, lesbienne, explorant surtout l’autobiographie (lisez Fun Home, c’est magistral) revendique parmi ses influences Robert Crumb, qui depuis 60 ans se fait insulter par les féministes à cause de sa représentation de fantasmes sexuels humiliant les femmes et confinant à la misogynie. Ce n’est pas un paradoxe, c’est une filiation complexe, comme on parle de pensée complexe, de nuance, quoi. D’un autre côté, qui peut prétendre entreprendre une bande dessinée autobiographique et ignorer l’influence de Crumb ?
On est bien avancés maintenant. Que faire ? De l’art. Ouf. L’art est ce pas de côté qui permet de ne pas succomber trop vite ni trop complaisamment au réel, de mieux le sentir dans sa main sur sa peau et dans ses yeux ce foutu réel, au lieu de seulement se faire avoir par lui. On n’est pas à sa merci ! On n’est pas sa chose, il est la nôtre, merde ! Et même : MONSIEUR Merde. Tiens il nous avait manqué, celui-ci. On est content de revoir monsieur Merde chier très littéralement dans les bégonias. Car je sors du cinéma. J’ai vu cela. J’ai vu les bégonias et le réel transfiguré. J’ai vu les 41 minutes et 19 secondes de C’est pas moi, dénégation enfantine et moyen métrage de Leos Carax. Ouf, pas de panique, en tout cas un peu moins de panique grâce au pas de côté : l’art est toujours là, la mise à distance, l’archi-intime et l’archi-universel en tresse plutôt qu’en détresse. Carax nous parle de lui, de son histoire et de celle du cinéma et de celle de l’Europe, histoire commune vieille d’un siècle mais il nous semble que le film nous parle d’aujourd’hui, car le tour de magie opère encore, et oui, et ouf, l’illusion que ce film a été fait ce matin en « réaction » . Film work-in-progress (ce sont les premiers mots qu’on lit sur l’écran), film patchwork, film installation, film happening, film sans mode d’emploi et puis quoi encore puisque ce ne sont que des images, film intemporel et c’est justement en cela qu’il donne cette impression si vive d’actualité, film de montage, de bric, de broc et d’amour, film de fantômes comme n’importe quel film (digne de ce nom), film quête-de-beauté comme n’importe quel film (digne de ce nom), film ludique quoique tragique, film godardien quoique caraxoïde, « C’est pas moi » recycle toute la filmographie de son auteur, jusques et y compris dans la scène post-générique où Annette joue le rôle de Denis Lavant, mais toujours sur du Bowie. Dans une scène que je suppose tirée de Holly Motors (2012) (mais je n’irai pas vérifier), un présentateur télé alerte ses spectateurs sur un étrange phénomène : plus personne en France n’a ri depuis trois jours. TROIS JOURS ? Sérieux ? Mais oui, c’est bien ça, je recompte sur mes doigts, nous sommes mercredi jour des sorties au cinéma, trois jours depuis dimanche soir. Comment l’a-t-il su, comment le sait-il depuis peut-être 2012 (mais je n’irai pas vérifier). L’art a raison et c’est à ça qu’on le reconnait. Et puis comme une menace certaines figures de l’extrême-droite défilent vers le premier tiers du film, elles tendent le bras en parade, elles aussi sont intemporelles, quoique certaines rient depuis trois jours, et sont créditées dans le générique de fin comme « Têtes de salauds » .
Oui, bon, j’ai bricolé cette affiche alors que je n’ai jamais dépassé le stade « débutant sur Photoshop » mais l’important est qu’elle soit informative. Soyez informés : la tournée Chagall, l’ange à la fenêtre passe bientôt près de chez vous ! (Du moins si vous habitez près de Claix, de Seyssinet, d’Oris-en-Rattier, de Grenoble ou d’Eybens.)
« La biographie de Marc Chagall (1887-1985) est un voyage. Né au sein d’une famille juive dans un shtetl de Biélorussie, il fait ses études à Saint-Pétersbourg et dès 1910 rejoint Paris, alors capitale mondiale des arts. Il retourne en Russie pour participer à la Révolution et sera même promu « commissaire aux beaux-arts » de la jeune URSS, avant de fuir définitivement son pays natal pour Berlin, les USA, le Brésil… La dernière partie de sa vie s’ancre en France, qui reste son pays de cœur. Nous évoquerons ses pérégrinations, son art et son époque, en mêlant le récit biographique, les images projetées… et bien entendu la musique, si présente dans son œuvre, avec un répertoire dominé par la musique russe mais s’autorisant, comme lui-même, des détours par le klezmer, la musique française du début du XXe siècle, et même l’opéra : l’une des dernières grandes œuvres de Chagall n’est-elle pas la fresque au plafond de l’opéra Garnier à Paris ? »
Violon : Christine Antoine Arrangements et piano : Bernard Commandeur Texte et voix : Fabrice Vigne Durée approximative : 1h10
Prochaines représentations :
– Dimanche 2 juin 11h, à Claix (mais c’est complet) – Dimanche 30 juin 11h, dans le château de Seyssinet – Vendredi 30 août 18h, dans la chapelle d’Oris-en-Rattier qui se trouve être le village natal de mon père mais ça n’a presque rien à voir – Lundi 9 septembre 19h, à l’Espace des Cultures Juives de Grenoble – Mardi 10 septembre, 19h, au 170 Galerie de l’Arlequin, chez Mme Marie M. et M. Christophe S. (nous passons leurs noms sous silence par souci de leur vie privée) – Samedi 23 novembre, 19h : Chambéry (73) – Samedi 30 novembre, 18h30 : chez Mme Valérie Levallois, Corps d’Uriage (38) – Mercredi 22 janvier 2025, dans le showroom de la Cogedim, Grenoble (soirée privée sur invitation, désolé les non-VIP) – Jeudi 23 janvier, en soirée, à Eybens – Samedi 25 janvier, en soirée, à Seyssinet – Dimanche 26 janvier, 11h, à Jarrie – Mardi 1er avril, 19h, Eglise / Salle polyculturelle de Val Thorens (73)
Des circonstances complètement inattendues ont permis que je mette la main sur un lot de correspondance familiale. Je lis avec des émotions variées ces lettres intimes qui courent de 1963 à 1981 et me révèlent des proches, dont mes parents, en leur jeunesse. Je découvre des inconnus, familiers. Je décortique avec des précautions d’archiviste cette capsule temporelle, ce temps qui passe, pris dans l’ambre sous la forme désuète de feuilles de papier pliées en quatre et cachetées sous enveloppes, avec parfois une découpe à la place du timbre (lorsque celui-ci était beau, rare, ou venu de l’étranger). Et souvent, parmi ces familiers inconnus, je tombe sur moi-même. Sur plusieurs moi-mêmes en des temps différents, comme disait le sujet de mon bac de philo. En voici deux.
1 – 16 janvier 1973 (j’ai trois ans et demi)
Ma mère écrit à son propre frère : « J’ai écouté le dernier Brassens, en présence de Monsieur Amice [c’est alors mon surnom, puisque je n’arrive pas à prononcer correctement Fabrice]. Il en résulte deux choses : maintenant, ce Fa chante n’importe quand « Quand je pense à Fernande, je bande, je bande » ou à la rigueur « Quand je pense à Félicien… [sic] » Je lui ai dit : « Ça veut peut-être rien dire, ça ». Ce à quoi il a répondu avec son aplomb habituel : « C’est Brassens qui le chante, alors ça veut dire quelque chose ». Et la 2e chose, consécutive à l’audition de ce disque pas pour les enfants, c’est que, à un moment, dans la chanson Quatre vingt quinze fois sur cent, la femme s’emmerde en baisant, il y a un truc qui a fait rire Fa aux éclats, c’est : « Chantez in petto » … Monsieur Amice a trouvé « Z’in petto » absolument irrésistible. Et il a trouvé que ça ferait un joli nom de chat. Il a passé un accord avec Laurent [mon frère aîné, 7 ans] : quand nous aurons un chat il s’appellera Zin Petto.« TROIS ANS ET DEMI !!! Je m’époustoufle moi-même. Je suis surtout épaté et, en quelque sorte, soulagé, par ma constance : Fernande est régulièrement citée, 50 ans plus tard, durant mes stages de création de chansons, en tant qu’exemple admirable, têtu et mécanique comme une érection, de l’usage des rimes plates (en revanche je parle plus rarement de Quatre vingt quinze fois sur cent). Je n’ai jamais eu de chat nommé Zin Petto. Il n’est peut-être pas trop tard.
2 – été 1981 (j’ai douze ans)
Dans une des toutes dernières enveloppes, contenant une carte postale d’été annonçant un déménagement, a été glissé un feuillet écrit de ma main. Ce gamin-là m’attendrit et me fait rire. Il fait plein de fautes d’orthographe mais il est marrant. Il commence par s’adresser à « Chaire [sic] fraîche », qu’il raye pour écrire plus sérieusement « Cher [sic] tous » . Il fait le mariole, il ne dit pas ses affres dont j’ai le vague souvenir. Je sais ce qu’il ne sait pas, mais j’ai oublié beaucoup de ce qu’il sait encore. J’aimerais le prendre dans mes bras et lui dire « Ne t’inquiète pas, chut chut ça va aller » et qu’il me rende mon câlin.
Puis je relève la tête et j’aime toujours aussi passionnément, et de plus en plus, le papier. Les papiers. L’endroit où s’écrivent les histoires, l’Histoire. Et je me demande ce qu’il restera dans 50 ans de nos monceaux de mails, textos, statuts, profils, posts, stories.
Depuis quelques jours cette phrase géniale, profonde et menaçante tourne dans mes intérieurs. Je ne sais pourquoi. Ou peut-être que je sais, c’est l’approche des élections européennes. L’Europe est cette utopie créée il y a si longtemps pour mettre fin à la guerre, mais c’est comme si personne n’y croyait plus, et on s’apprête à envoyer au parlement, pour y représenter le peuple, des gens qui ne croient ni à l’Europe ni à la paix.
Cette phrase me fait aussi penser à Flon-Flon & Muzette, livre dit « jeunesse », génial, profond et menaçant, par Elzbieta (Pastel, 1994). Dans ce livre mettant en scène deux enfants qui s’aiment, la guerre n’est jamais morte, il faut juste profiter des moments où elle dort.
« La paix, c’est quand la guerre est ailleurs. » Cette phrase est, au hasard du web, attribuée à Jacques Prévert. Mais d’où sort-elle, au juste ? D’un poème ? Du dialogue d’un film ? D’un propos ? Je ne parviens pas à identifier sa source exacte. Quiconque la débusque pour moi gagne un livre du Fond du Tiroir.
Depuis des années un livre luit d’une phosphorescence singulière dans ma bibliothèque : Conte démoniaque d’Aristophane (L’association, 1993). Trois cents pages de souffre et d’encre. Une ampleur imaginaire et graphique exceptionnelle. Une somme mythologique à la fois radicalement personnelle et universelle. Une ambition, une proposition, un style, un auteur, un hapax. Depuis des années je chéris ce livre en ignorant à peu près tout de son auteur, mis à part qu’il est mort bien jeune. C’est la page FB de David Vandermeulen qui me révèle aujourd’hui la tragédie que fut l’existence de Firmin « Aristophane » Boulon (1967-2004). Génie précoce et discret, prometteur et unique en son genre, il n’aura publié que cinq livres, plus quelques pages en revues, avant qu’un accident de chauffe-eau esquinte à jamais son visage et ses mains. S’en est suivie une grave crise existentielle et mystique qui l’a conduit à renier son œuvre, tout spécialement ce Conte démoniaque, à brûler ses originaux, et interdire formellement à ses éditeurs toute réimpression. Il clôt sa vie et donc son œuvre, toutes les deux fulgurantes et brèves, à 37 ans. Je relis aujourd’hui Conte démoniaque, chef d’oeuvre introuvable de la volonté même de son auteur, et j’ai peur dans le livre et je pleure dans la vie.
II – Ed Piskor
Toujours sur Facebook. J’apprends avec stupéfaction, le 1er avril 2024 comme si c’était une blague, le suicide à 41 ans du fabuleux dessinateur américain Ed Piskor. Il s’était fait connaître comme collaborateur de Harvey Pekar (American Splendor) avant de devenir son propre scénariste. Il s’est consacré à une monumentale, érudite et stylisée histoire du Hip-hop (Hip-hop Family Tree chez Fantagraphics, deux sélections officielles à Angoulême) puis à une relecture, plus grand-public mais magnifique tout de même, intelligente, épique et même tendre, de la saga des X-Men (X-Men: Grand Design), puis, dans un genre plus confidentiel, il s’était lancé dans une curieuse série trash et ultragore, Red Room… Il a été débordé par une accusation de harcèlement sexuel qui, malgré ses dénégations, lui a valu une shitstorm (en français : un ouragan de merdasse) sur les réseaux sociaux, dont il ne s’est pas remis. Il a laissé une longue note avant son suicide, glaçante puisqu’il y parle de sa mort comme déjà advenue, comme s’il était déjà fantôme :
I’m dead. I don’t have a reason to lie. […] We’re not built to have hundreds (maybe a few thousand?) people judging and/or harassing us at once. A private and solitary mind can’t take it. […] I was murdered by Internet bullies. Massive amounts of them. Some of you out there absolutely contributed to my death as you were entertaining yourself with gossip. I wasn’t AI. I was a real human being. You chipped little bits of my self esteem away all week until I was vaporized.
Il signe « Ed Piskor, 1982-2024 » cette lettre si effrayante et si triste. Oui, la vague #metoo est nécessaire. Mais parfois ce qui est nécessaire n’est pas juste. Les harcèlements sexuels détruisent des vies ; les harcèlements par réseau social, les lynchages par tribunal populaire, numérique, anonyme et lâche, aussi. Les uns ne sauraient excuser les autres.
III – Eric Repellin
J’apprends avec grand chagrin la disparition, suite à un cancer particulièrement vicelard, de l’ami Eric Repellin. Eric a fondé sa librairie à Grenoble en 1988 et l’a baptisée « Harry Morgan » quand bien même le logo sur l’enseigne représentait Humphrey Bogart vêtu non en Harry Morgan (son personnage dans Le Port de l’angoisse) mais plutôt en Philip Marlowe à moins que ce ne soit Rick Blaine ? Voilà le genre de conversation pour le plaisir de ferrailler et pinailler que j’aimais avoir avec lui. Depuis 1988 ou à peine plus tard, donc, j’adorais passer des heures dans sa boutique, pour acheter un livre ou pas (ou plusieurs), mais surtout pour discuter sans fin de bandes dessinées, de musique, de polars, de cinéma, et de la vie en général, de nos filles respectives (deux chacun). C’était un excellent homme, intelligent mais bonhomme, drôle, cultivé, bienveillant, et de bon conseil dans les lectures. Nous avions des passions communes (Moebius, évidemment, dont nous détaillions les rééditions) mais il m’a permis d’innombrables découvertes : par exemple il a été le tout premier, voici au moins 15 ans, à me dire : « Tu ne devrais pas prendre Manu Larcenet pour un simple rigolo, tiens, lis « Presque » et on en reparle… Alors non, son « Blast » n’est pas une surprise… » Flûte, je ne pourrai pas lui demander ce qu’il pense de La route, le dernier livre de Larcenet. Il me manque. Obsèques ce vendredi. Toutes mes condoléances à sa famille.
« Sur quoi as-tu changé d’avis ces 10 dernières années ? » : c’est l’une des questions que je préfère poser aux gens que je rencontre pour la première fois. Elle dit beaucoup sur quelqu’un […] parce que c’est une question qui raconte toujours une histoire. Une histoire de temps qui passe et de rencontres. Elle dit ce qui a été et ce qui est désormais. Comme le luminol, ce liquide bleu phosphorescent qui révèle le sang d’une scène de crime, c’est une question qui révèle nos contradictions. Pour certains, changer d’avis, c’est se trahir. Eric Zemmour reprochait, en septembre dernier à Mélenchon d’avoir, en 20 ans, changé d’avis sur la burka : il citait alors Talleyrand, « je pardonne aux gens de n’être pas de mon avis, je ne leur pardonne pas de n’être pas du leur » – faisant partie de ces gens qui se targuent d’être absolument d’accord avec eux-mêmes depuis vingt, trente, quarante, cinquante ans. A-t-on encore le droit de changer d’avis ? Blandine Rinkel
J’ai changé d’avis. J’ai changé tout court. Comment n’aurais-je pas changé puisque le monde a changé. Faudrait-il se fixer pour règle de ne pas changer, et par-dessus le marché s’enorgueillir de rester intact au milieu d’un monde qui change ? Dans le marbre, dit-on pour signifier que c’est pour si longtemps que c’est pour toujours, sauf que non, combien il dure le marbre, combien il est dur, Le marbre pour l’acide est une friandise, ainsi qu’a dit le poète.
J’ai changé : depuis longtemps et même à peu près toujours, l’un de mes films préférés, de mes films culte, aura été Zéro de conduite de Jean Vigo. C’est fini.
À une époque, je le voyais une fois par an, avec un plaisir intact. Je constate que je ne le vois plus. Je l’avais même montré à mes enfants quand elles étaient petites. Je ne sais pas si je le leur montrerais aujourd’hui.
Zéro de conduite est un film sur le chahut salutaire et carnavalesque ; sur la liberté, en somme. Je raffolais de ce bloc d’anarchie douce où les collégiens renversent leur collège sens dessus dessous et cul par-dessus tête, prennent le pouvoir. Les adultes y sont ridiculisés, décrédibilisés et bien fait pour eux, ils y ont le sale rôle, celui de la contrainte, de la rigidité intellectuelle et morale, de la norme, du système, du pouvoir, du passé. Faisons table rase !
Ce film a infusé en moi en compagnie d’autres oeuvres qui pédagogisaient l’anarchisme en direction des enfants et des ados (Le roi et l’oiseau de Prévert et Grimault, Gaston Lagaffe de Franquin, The Wall de Pink Floyd, vous souvenez-vous de Hey teachers, leave us kids alone ?). J’en faisais régulièrement l’éloge lorsque l’on m’invitait à présenter mes livres dans les collèges – je me rends compte qu’alors ma posture, a priori, était toujours de me ranger du côté des élèves, contre les profs (j’avais beau jeu… ou étais-je simplement démago ?), j’imaginais que mon irruption dans la classe incarnait le même mouvement ascendant que Zéro de conduite, cette rébellion, cette aspiration à la liberté, cette fureur créatrice punkoïde, cette rupture dans la routine, cette responsabilisation, cette élévation de la conscience de soi-même, cette joie aussi et surtout. Je recommandais la vision de ce film et je tenais d’ailleurs, je tiens toujours, pour preuve de son génie le fait qu’il ait été censuré treize ans après sa sortie : il était dangereux pour la jeunesse. Vive le danger et la subversion. Ah ah ah.
Et puis voilà que c’est fini. Le danger est manifestement ailleurs.
Se moquer des profs aujourd’hui, ce serait comme faire une blague juive en 1943 : au minimum une obscénité, au maximum une criminelle complicité. Se moquer des profs, c’était bon enfant, vivent les vacances, les cahiers au feu, la maîtresse au milieu. Mais nous sommes passés d’une époque bon enfant à une époque mauvais enfant, comme il est dit quelque part dans Ainsi parlait Nanabozo.
Je viens de voir Pas de vagues, le dernier film de Teddy Lussi-Modeste, où des collégiens prennent le pouvoir, renversent leur collège sens dessus dessous et cul par-dessus tête, chamboulent au passage tous les adultes à l’intérieur. Un film parmi de très nombreux autres tombant en cataracte (L’Affaire Abel Trem, Comme un fils, Bis repetita, La salle des profs, L’Innocence, Amal un esprit libre… liste impressionnante à laquelle j’ai ajouté un film roumain de 2021), qui tous montrent à quel point le métier de prof est devenu difficile, peut-être impossible, en tout cas héroïque, et atrocement solitaire au beau milieu d’une fourmilière. Cet empêchement du métier de prof est une catastrophe globale qui me touche intimement mais qui ne peut que toucher intimement chacun d’entre nous, en ce qu’il révèle que, sans enseignement commun, nous ne pouvons plus faire société. Sans l’Éducation Nationale, que l’on peut certes d’abondance moquer et critiquer, la société française n’existe tout simplement plus. Il faut la critiquer et la chérir, l’Éducation Nationale. Un peu comme la démocratie. Puisque c’est pareil.
Quel chemin avons-nous parcouru en 90 ans, de Jean Vigo à Teddy Lussi-Modeste ? Je ne parle pas de cinéma, je parle de ce dont parle le cinéma. Ce que nous avons gagné, ce que nous avons perdu en 90 ans.
Je suis sorti de la salle en mauvais état, accablé, angoissé, terrifié. Mais convaincu que c’est ce film-ci que je conseillerais à des collégiens aujourd’hui, c’est celui-ci qui élèverait leur conscience. Ma préconisation à la jeunesse remplacerait donc un film éminemment joyeux par un film fondamentalement stressant. Heureusement que je ne suis plus invité dans les collèges pour parler de mes livres.
PS. Je pars me changer les idées dans la Loire, je fais un peu de tourisme autour du barrage de Villerest, c’est très joli. Soudain je butte, en traversant le charmant village de Saint-Jean-Saint-Maurice-sur-la-Loire, contre cette plaque de rue que je vous adresse en carte postale. L’odonyme était presque parfait.
Cette nuit, j’enquêtais sur Ferdinand Walz. Ferdinand Walz (mais est-ce son vrai nom ?) joue du piano dans un groupe dont je fais moi aussi partie. C’est un garçon très discret, sans âge, ni signe particulier, souriant mais passe-muraille, qui ne parle que pour répondre, laconiquement, aux questions qu’on lui pose. Un soir, lors des bavardages qui suivent une répétition, je lui ai demandé ce qu’il faisait dans la vie. Il m’a répondu, aimable mais évasif, qu’il travaillait dans la cuisine centrale de la communauté de communes, je m’en suis contenté, je n’ai pas creusé la question. Sauf qu’en consultant les archives, je me suis rendu compte d’un détail troublant : sur toutes les photos de notre groupe, prises lors de répétitions ou de concerts, pas une seule fois Ferdinand Walz n’est vu de face, on ne voit jamais que sa nuque, qu’il soit debout parmi nous ou bien assis à son piano. C’est peut-être une coïncidence. Ou alors… Ferdinand Walz s’efforce de ne jamais laisser capturer son visage. Je recoupe les informations, comme font les flics dans les séries, sur un grand panneau de liège où tous les éléments sont épinglés, photos, post-it, pièces à conviction, plans d’architecte, horaires des chemins de fer ou des marées, mode d’emploi multilingue de la cuisinière, points d’interrogation remplaçant les pièces manquantes (en l’occurrence, le visage de Ferdinand Walz), reliés par des fils de couleur qui forment comme une toile d’araignée. Et je parviens à la conclusion sidérante quoiqu’incontestable : Ferdinand Walz est un cambrioleur. À chaque fois qu’il a été absent d’une répétition, un appartement a été dévalisé, d’ailleurs très soigneusement, proprement, sans trop de dégâts. Cette histoire de cuisine centrale est une couverture bien commode ! Maintenant que j’ai percé à jour Ferdinand Walz, je dois décider que faire de ma découverte. Tout balancer aux flics ? Lui en parler d’abord, pour tâcher de comprendre sa vie et ses motivations ? Ne rien dire du tout et continuer à jouer de la musique avec lui ? Je suis en proie à ce dilemme moral lorsque je me réveille, réalisant que je n’ai même pas gardé dans ma propre mémoire l’image mentale du visage de Ferdinand Walz.
Et pendant ce temps, sur la terre : « Tchouang-tseu rêve qu’il est un papillon, mais n’est-ce point le papillon qui rêve qu’il est Tchouang-tseu ? » (cité par Raymond Queneau, Les fleurs bleues) Réalisation d’un papillon en atelier pop-up sous la direction de Philippe UG.
Éditeur et blogueur depuis avril 2008.
Treize livres au catalogue. Deux épuisés, onze en vente. Tous remarquables, achetez-les en lot.
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