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Bilan moral et financier (et un peu écologique)

Le Fond du tiroir existe depuis trois mois. Dans un souci de transparence, voici quelques données de type « bilan et perspective » de ma petite entreprise. Et ceci au beau milieu du temps des catastrophes, de la globalisation des violences tribales, du fatal réchauffement de la planète, de l’obligation de résultats du Ministère de la Francisque et de l’Identité Nationale, de l’effondrement conjoint du moral des ménages et du pouvoir d’achat (car le moral est lié intrinsèquement au pouvoir d’achat : voilà où nous sommes rendus), des tensions internationales et de la blingblingation de la France, des communautarismes imbéciles, des mariages annulés parce que l’épouse n’était pas vierge, des ressentiments sociaux évacués dans l’Eurofoot (hélas la catharsis a fait pschittt ! les Français sont éliminés ! ah, les nuls ! il faut par conséquent trouver un exutoire d’urgence : je propose de les lyncher en place publique), des égoïsmes décomplexés, des individualismes forcenés, des mémoires effacées, des politiques de saccage culturel, et des Rafales vendus avec le sourire en Arabie Saoudite. Et qu’est-ce que je fais, moi, au beau milieu de ce temps ? Je redécore le fond de mon tiroir. Il y fait frais. Voici l’état des lieux.

1) Le blog. Je me serai bien amusé tout au long de ce printemps pourrave avec mon joujou, merci beaucoup (grand merci, au fait, à mon webmestre qui préfère demeurer anonyme, son nom de famille étant compromettant). Mais je vais très prochainement le mettre en veilleuse, pour ne le réouvrir que lorsque j’aurai écrit un livre. Je crois qu’au fond du fond, je préfère écrire des livres que des blogs.

2) Mes apparitions publiques. Elles se sont multipliées comme jamais cette année. Hé bien, pour être franc, c’est trop. Comme un blog, c’est excitant, un agenda rempli. Mais ce n’est pas ce qui va me permettre d’écrire ce que je cherche. Par conséquent, pédale douce. En ce qui concerne mes apparitions virtuelles : les polémiques continuent de faire rage (ou plutôt de faire enrager) au sujet de la « littérature ado », chez Blandine Longre ou chez Citrouille et son forum [NDLR : ce lien-ci est pour le moment invalide, Citrouille ayant préféré déconnecté son forum où les échanges s’étaient envenimés…], mais désormais je les lis en me retenant de participer (et pourtant, je suis parfois indigné !) ; et en ce qui concerne mes apparitions physiques : ma dernière prestation de la saison aura lieu ce samedi 21 juin, 18h, à Grignan, et ensuite basta, plus rien jusqu’à l’automne. Je vais disparaître un peu, et si tout va bien j’écrirai. Ou même si tout ne va pas bien. Over and off.

3) L’actualité éditoriale : c’est vrai, au fait, « Le fond du tiroir » est, faute de terme plus adéquat, un « éditeur ». Une structure est née, à seule fin de bricoler des livres désintéressés et intéressants. Un premier livre est paru. Tiré à 260 exemplaires, vendu à ce jour à 84 (il en reste 176, mesdames et messieurs !). Etant donné le prix de revient calculé d’après mes frais d’impression et de graphiste, je récupèrerai ma mise, et par conséquent serai en mesure de programmer une autre publication, lorsque j’en aurai vendu 230 : il me restera alors les 30 derniers pour faire du bénef (parce que je suis un vrai biznessman)… Sauf que ce sera moins de 30, finalement, parce que j’en ai donné quelques uns…

Cet opus vit sa vie et engendre des effets à sa mesure, qui est toute petite. Une conséquence notable, toutefois : c’est fou le nombre de gens qui viennent me raconter leurs rêves (de même qu’à l’époque de TS, ils venaient me raconter leur dictionnaire). J’aime beaucoup ça. Certains même m’avouent qu’ils ne se souvenaient jamais de leurs rêves avant d’avoir lu l’Echoppe, ce qui est trop flatteur pour ne pas être suspect. Si je n’avais que ça à faire, je construirais un blog sur le champ où tout un chacun serait invité à écrire son rêve de la nuit dernière (l’idée me paraît tellement bonne que je suis certain que cela existe déjà…).

L’Echoppe est née de cinq conditions propices : le soin, la joie, la liberté, la grâce (au sens de « gratis ») et plus que tout une déterminante complicité avec le Factotum de première classe du FdT, j’ai nommé Patrick Villecourt. Patrick s’est dépassé sur ce bouquin sui generis à la mine gracieuse, mystérieux, homogène et pourtant fourmillant. Je le lui ai déjà dit en privé, mais je le répète devant tout le monde (ça va ? tout le monde est là ? serrez-vous, au fond) : merci, vieux. Nous avons bien travaillé sur cette Echoppe, MAIS ! MAIS ! MAIS ! on va faire encore mieux la prochaine fois. Parlons peu mais parlons bien, parlons de littérature, et d’avenir : voici le programme de publication 2008-2009 du FdT.

L’Echoppe ne sera jamais réimprimée, quelle que soit la durée nécessaire à l’épuisement du stock. Le caractère évanescent de ce volume fugitif comme une volute participe de la beauté du geste.

– Le deuxième livre à paraître devrait s’intituler Le plus beau pays. Il s’agit d’un projet ancien, ressuscité sur le tard, parce que très beau tout compte fait : bref, le profil idéal pour surgir miraculeux, miraculé, estampillé « Fond du tiroir ». C’est un album pour enfants, dans un format cinémascope et en quadri s’il vous plait. On rêve tout haut, on l’imagine, on ne se refuse rien, on ne vous dit que ça… Le texte est provisoirement-définitivement achevé, mais en revanche Patrick a une masse de boulot à accomplir sur les illustrations, encore plus conséquente que pour l’Echoppe. Donc on peut annoncer sa sortie pour l’hiver prochain, mais seulement pour pouvoir la retarder quand on sera parvenu là.

– Le troisième livre serait La légende du monde. Pour celui-ci, c’est surtout à moi qu’il appartient de turbiner (quoique la mise en page, à nouveau confiée à l’indispensable Factotum, sera croquignolette). Il s’agit de mon projet en alexandrins, ma saga du quotidien, mon chantier à la fois le plus sublime et le plus dérisoire. Lui aussi, il ne pourrait trouver place nulle part ailleurs qu’au Fond du tiroir. J’en ai écrit environ 15%, par conséquent son achèvement n’est pas envisageable avant 2009.

– Je ne voulais éditer au Fond du tiroir que les manuscrits au fond de MON tiroir… Sauf si je trouvais un manuscrit meilleur que les miens. Or, je crois que j’en tiens un. J’ai sous le coude un excellent texte, et encore, excellent dans une version inachevée. Son auteur est prévenu : voilà un roman que j’aimerais éditer ; mais le choix lui appartient : soit il a pour son texte de grandes ambitions, et il le propose à Galligrasseuil, soit il adhère à la démarche FdT (Soin, joie, liberté, grâce et complicité : maison de qualité, fondée en 2008), et il recherche exclusivement l’élégance et la perfection du geste, pour une distribution éthérée et underground. Ceci dit, j’apprends, je progresse, je corrige, pour ce livre-ci je ne ferai pas comme pour l’Echoppe : je ferai un tirage suffisant pour pouvoir dégager une marge adéquate permettant un dépôt en librairie. (Je rappelle que l’Echoppe n’est pas vendue en librairie pour une raison simple : la marge des libraires, environ 30%, m’obligerait à leur vendre ce livre moins cher que ce qu’il m’a coûté).

– Entre temps (mais quand ?) le FdT sera, je le suppose, devenu une association pour accéder à un statut juridique et financier. Plus ça va, plus ça ressemblera à un vrai éditeur. Dingue, non ?

– Reste le cas, sensible, d’un de mes livres publié ailleurs, et épuisé. Je suis très indécis. Savoir ce livre indisponible me brise le coeur et les couilles (excusez mon français). Je ne crois pas que le FdT soit l’éditeur qui convienne à ce livre, qui mériterait une vraie distribution, mais peut-être que je pourrais au moins faire un tirage d’appoint, une grosse poignée d’exemplaires en attendant qu’il trouve un vrai éditeur, afin de vivoter en attendant. Quoiqu’il en soit je ne ferai rien sans l’avis du co-auteur, et bien sûr de l’actuel détenteur des droits.

Voilà ! Toutes ces ambitions doivent être nuancées par les finances. Contrairement à certains éditeurs intrépides et torpillés, je ne veux en aucun cas (EN, AUCUN, CAS) dépenser de l’argent que je n’ai pas. Or, sur ce splendide planning, je n’ai, en l’état actuel, les moyens de financer que la moitié d’un seul livre (Le plus beau pays, a priori). Pour les suivants, il faudra attendre que de l’argent rentre, afin de le faire sortir.

Par ailleurs, j’ai des projets pour d’autres éditeurs, bien sûr. Jean II le Bon, et peut-être L’arbre et le bâton pour Magnier, et, à plus court terme, le bref 1969 pour Pré carré.

Et pendant ce temps, la planète se réchauffe, le moral s’effondre, etc.

  1. 21/06/2008 à 21:54 | #1

    Cher favigne brice,

    je transmets ce message qui a été (indûment ?) laissé sur mon blog.
    Comme ce dernier semble ne pas fonctionner depuis ton ordi…

    « Voici le sujet d’invention qui a été proposé au bac de français des séries technologiques cette année:
    « Après avoir lu un roman, un lecteur adresse un courrier au romancier pour lui reprocher la vision très pessimiste qu’il donne de la réalité. Quelques jours plus tard, il reçoit la réponse du romancier qui défend sa position. Rédigez successivement la lettre du lecteur et celle du romancier. Chacune des deux lettres ne dépassera pas trente lignes. »

    Je récupère 70 copies à corriger lundi, j’espère que certains candidats auront osé se lancer dans ce sujet. Gageons que la lecture de leur travail sera au moins aussi représentative et instructive que la pseudo étude sociologique de Citrouille ou l’avis des lecteurs du site Fnac!

    @ Fabrice Vigne: TS fait partie des romans qui m’ont le plus marquée ces dernières années (certes, je ne suis plus adolescente – quoique? – et je ne dépose pas de commentaires de livres sur les sites commerciaux…)  »

    signé :Myriam Gallot

  2. Marie
    24/06/2008 à 22:21 | #2

    Dommage que tu fermes le blog… mais tant mieux si c’est pour écrire des livres. Comme tes rêves (et tes autres histoires, incontestables ou pas) peuplent mes insomnies, je ne me plains pas (trop). Moi aussi j’aime bien regarder la lune, mais ça n’occupe pas toute la nuit, et puis, ces derniers temps, elle était plutôt couverte.
    Alors au travail, Fabrice !

  3. 30/06/2008 à 20:25 | #3

    Note de bas de page à propos du début de cet article, « des mariages annulés parce que l’épouse n’était pas vierge » :

    Lettre ouverte
    à Monsieur Nicolas SARKOZY
    Président de la République

    Suite au Manifeste des menteuses lancé le 2 juin par le Festival du Livre de
    Mouans-Sartoux, et aux 3632 signatures actuelles, de femmes et ’hommes de progrès, attaché-e-s aux valeurs de liberté, d’égalité, de laïcité, de mixité… nous demandons au Président de la République de soumettre à un comité de réflexion mixte la modification de l’article 180 du Code civil.

    Aujourd’hui, un grand nombre de femmes, en France, ne se sentent plus protégées par la Justice. Deux principes de notre République : liberté et égalité, sont bafoués. La laïcité, valeur partagée par l’ensemble des républicains, est désavouée. Par un jugement de notre Justice.

    Le jugement du tribunal de Lille, pour avoir voulu concilier les deux parties, ouvre une brèche dans les fondements légaux du mariage, basés sur le Droit et sur l’égalité des époux et des sexes. Et sur le respect de la vie intime des individus.

    L’annulation de ce mariage se réfère à l’article 180 du code civil, que le conjoint a invoqué :  » S’il y a eu erreur sur la personne ou sur les qualités essentielles de la personne, l’autre époux peut demander la nullité du mariage « . La virginité est ainsi devenue, par erreur ou par négligence des juges, une qualité essentielle pour la mariée. LA mariée. Ce jugement gomme d’un seul coup l’égalité des sexes, il gomme la liberté des femmes
    à disposer d’elles-mêmes. Cette annulation ne doit pas faire jurisprudence.
    La Justice, le Droit, la République, ne peuvent cautionner une décision aussi régressive et humiliante pour les femmes. Une décision qui ouvre la porte d’une Justice à la carte, variant selon les moeurs, traditions ou croyances de chacun.

    Ne perdons pas de vue l’essentiel : s’il y a une faille ou une insuffisance dans la loi, il faut modifier la loi.

    Nous vous demandons, Monsieur le Président, de soumettre à un comité mixte de juristes la modification de l’article 180 du code civil, afin que le traitement de telles affaires respecte le Droit républicain français fondé sur la laïcité et l’égalité des sexes. Ni plus, ni moins.

    Marie-Louise GOURDON
    Conseillère générale des Alpes-Maritimes
    Maire-adjointe à la culture
    Commissaire du Festival du livre de Mouans-Sartoux

    Signez et faites signer le Manifeste des Menteuses
    sur http://www.lefestivaldulivre.fr

  4. 07/08/2008 à 18:14 | #4

    Bonjour
    je viens de recevoir mon exemplaire à moi de L’échoppe enténébrée (tuyau piqué chez Sylire). Je n’ai encore lu que deux ou trois rêves, et bien qu’assez prosaïque, j’avoue y avoir pris un goût certain ! Assez amateur en général de livres sortant de l’ordinaire soit par l’histoire, soit par l’écriture, je pense être tombé sur un beau petit livre fait pour moi. Bonne continuation
    Yves Mabon

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