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Les habits neufs du Secrétaire Général de l’UMP

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Depuis que je lis (aux deux sens de ce verbe : lecture en silence, lecture en public ; pour moi et pour d’autres) des contes, l’un de mes favoris est Les habits neufs de l’empereur ou, selon les traductions, du Grand duc, d’Hans Christian Andersen (1837). Pour mémoire, l’empereur, abusé par des filous, défile dans la rue à poil – sous-entendu : il expose sa chair, il avoue n’être qu’un être humain, comme toi et moi. Tout le monde le voit. Tout le monde le sait. Personne ne le dit, sauf les enfants et les fous.

Les rapports de force, les hiérarchies, les injustices, les dominations symboliques… perdurent autant que les flatteurs font croire aux puissants de ce monde, et croient peut-être eux-mêmes, qu’ils sont autre chose que des corps nus sous leurs fringues. J’adore cette morale joyeuse, et plutôt atypique chez le conteur danois, qui témoigne plus fréquemment d’un rigorisme protestant que d’une subversion libertaire. La portée politique est évidente. C’est de démocratie qu’il s’agit : comme le chante Nougaro, au-delà de nos oripeaux, nous sommes tous des corps, nous jouissons tous (ou souffrons tous) d’une peau et d’une paire de fesses ! Partons de ce que nous avons en commun pour établir sainement les règles de notre vie commune.

Haut les mains peau d’lapin la maîtresse en maillot de bain

En 2011 paraît au Rouergue Tous à poil !, joli album du couple Claire Franek Marc Daniau, qui me semble ni plus ni moins une prolongation, une réactivation de cette tradition presque bicentenaire, éveiller les enfants par la malice à une vérité essentielle, occulte quoique salutaire pour la vie démocratique : nus, défaits de nos atours qui dénotent profils sociaux, prestiges et nivellements divers, nous nous ressemblons tous un peu.

Ce livre fait parler de lui aujourd’hui, davantage qu’à sa sortie, grâce à M. Jean-François Copé, qui ne loupe aucune occasion de signaler aux multitudes du Printemps français, cette hétérogène vague de fond réactionnaire, pudibonde et moraliste, qu’il se tient à leur disposition pour les représenter dans les médias et surenchérir dans l’intox. Le gluant Copé vient s’indigner sur un plateau télé contre cet ouvrage, qu’il tient pour un symptôme de plus, le symptôme de trop, de la gabegie, de l’obscénité et de l’indignité de la présidence Hollande. « Mon sang n’a fait qu’un tour », vibre-t-il. Suit un chapelet d’âneries et de contre-vérités – sous-entendre qu’on utilisera ce livre comme mot d’ordre obligatoire en classe et non comme fiction cathartique, est à peu près aussi malin que faire courir des rumeurs sur les cours de masturbation ou de travestissement en maternelle. On voit pour qui roule Copé – on voit qui il veut faire rouler pour sa personne.


Jean-François Copé et le livre « Tous à poil » par LeLab_E1

Ce lamentable débordement révèle, outre l’inquiétant niveau du débat politique, que le statut et la reconnaissance de la littérature jeunesse non seulement ne s’améliorent pas en période de crise partout-partout, mais se dégradent à vive allure. Les livres que l’on place entre les mains de nos enfants sont cantonnés dans un rôle précis et exclusif, édifier, et la seule critique digne d’eux est encore et toujours morale

Signe qui ne trompe pas : ni Copé, ni presque aucun des articles que j’ai consultés, Le Monde, Libé, etc., ne mentionnent les noms des auteurs de ce livre. Comme si la littérature jeunesse, contrairement à la Littérature, était une force vague et anonyme, une masse indifférenciée sans rapport avec la créativité individuelle, un phénomène social, acéphale, une fonction utilitaire, institutionnelle ou idéologique, en tout cas sans auteur… Je répète : Tous à poil ! est un livre de Claire Franiek et Marc Daniau. Qui sait ? Peut-être que si on prend la peine de s’adresser à eux, ils auront un avis sur la question ? Claire Franiek interviouvée par le Nouvel Obs :

« Monsieur Copé va fabriquer des générations de tordus et de frustrés, parce que ça veut dire qu’il y a des livres et des sujets dont on ne peut pas parler avec les enfants. C’est très hypocrite. »

Et maintenant, pour nous laver les yeux et les oreilles, effacer les restes de la chanson de Copé, écoutons un peu d’Allain Leprest. De rien.

(La suite ici)

  1. Franck Pélissier
    10/02/2014 à 13:32 | #1

    C’est dingue de voir quelles sont les préoccupations de l’un de nos dirigeants politiques qui se voudrait « de premier plan ». Ce type est vraiment lamentable à vouloir absolument faire feu de tout bois et il se trompe une fois de plus de cible.
    Sinon, Fabrice, si tu veux que tes livres aient plus de succès, je te propose d’en renommer quelques uns : « Les poils » plutôt que « La mèche » ; « Le reflux » plutôt que « Le flux » ; que « ABC Mademoiselle » comporte une parenthèse (la culotte) entre les deux mots du titre originel ; « Jeanne t’es bonne ! » plutôt que « Jean II le Bon » ; « Docteur Saucisse, de la Faculté de mes deux seins de Marie » plutôt que « Dr. Haricot, de la Faculté de médecine de Paris »… Bref, les possibilités sont nombreuses et je t’assure que si tu suis mes recommandations, les Coppé, Le Pen, Morano, Guaino, Dupont Aignant, Boutin et consorts vont t’assurer une promo et un service après-vente aux p’tits oignons !

  2. 14/02/2014 à 10:35 | #2

    Cher Fabrice, je crois que vous devriez laisser tomber le roman d’horreur pour aller dans le thème très porteur de l’érotisme pour enfants, enfin de ce que certains appellent comme tel. Service de presse assuré, mais perso ça me ferait mal au c.. de vendre grâce à Copé et sa clique de culs-faussement-bénis.

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