Good night, sweet princess

14/04/2025 Aucun commentaire
Le Sommeil, aussi intitulé Les Deux Amiesles Dormeuses ou Paresse et Luxure (1866, Musée des beaux arts de Paris, Petit Palais)

Je teste la censure de Meta (ou plutôt son absence) en publiant sur Facebook l’aimable tableau de Gustave Courbet ci-dessus, pudiquement intitulé Le Sommeil (c’est ça, ouais, sommeil, mais bien sûr, elles dorment à poings fermés, là, que votre nuit soit paisible les filles, et surtout faites de beaux rêves hein).

Car est venue l’heure de révéler officiellement la date de création du spectacle en trio Courbet : Je n’ai jamais eu d’autres maîtres que la nature et mon sentiment (titre trop long mais provisoire).
Christine Antoine au violon,
Bernard Commandeur au piano et aux arrangements,
Fabrice Vigne à l’écriture et à la voix.

C’est calé, c’est réglé, c’est dans le marbre. Le spectacle sera dévoilé le vendredi 27 juin 2025 au Château de Seyssins, et rebeloté dès le lendemain samedi 28 tant qu’on est chaud, chez Mme Evelyne Reinhart à Claix.
On lui souhaite le même succès que les deux précédents, Goya : démons et merveilles et Chagall : l’ange à la fenêtre, joués une quinzaine de fois chacun et ce n’est pas fini, des dates continuent de tomber, ça pourrait être assez classe de tourner simultanément les trois spectacles au catalogue, voire de se programmer un petit marathon, matin, après-midi, soir. Si quelqu’un est tenté : message privé hop hop.

Or la réaction (et c’est le cas de le dire) n’a pas tardé : il reste bel et bien un peu de censure sur effebé. Le réseau m’informe illico que le chef d’oeuvre de l’art moderne que je viens de diffuser est « rétrogradé dans le fil » (quoi pardon ? j’ai comme l’impression que c’est une contrepèterie, ah ah je vois ce que tu veux dire petit coquin Mark Zuckerberg) parce qu’il « ne respecte pas nos Standards de la communauté, des restrictions peuvent être imposées à la Page. »

Mais c’est bon. Je crois que j’ai trouvé le moyen de contourner la censure de FB pour vous annoncer la création du spectacle « Gustave Courbet » (le 27 juin à Seyssins, le 28 juin à Claix, venez nombreux).Mesdames et messieurs, j’ai la joie de dévoiler devant vos yeux éblouis… L’Origine du Monde !

Nan c’est même pas vrai, il s’agit de la cascade du Furet, photographiée depuis Barraux, dimanche dernier à l’ occasion du brunch des Détours de Babel, oh le beau paysage.

Bon, pour de vrai ça me saoule. Comme je le fais de temps en temps, je déserte FB.

On ne peut pas lire en boucle Je me souviens de Perec.
Je lis J’ai oublié, le beau recueil de mémoire plein de trous de Bulle Ogier (Seuil, 2019), écrit très élégamment, avec poésie, douceur, nonchalance et cependant conscience écrasante du tragique (nul chapitre sans une pensée pour ma fille Pascale).
Je tombe dès la page 26 sur une citation de Marguerite Duras que Bulle avait immédiatement adoptée, et, aujourd’hui, moi aussi, merci à toutes les deux : « Si j’avais le courage de ne rien faire, je le ferais. »
Je gougueule cette phrase merveilleuse parce que j’aime avoir les références exactes des mots que je fais miens. Hélas tous les résultats dans le moteur renvoient au livre de l’actrice. J’en déduis que Duras n’a jamais écrit cette phrase, elle l’aura sans doute prononcée en présence de Bulle Ogier sur le tournage de l’un des trois films qu’elles ont faits ensemble. Car elles ont fait des films, beaucoup de films, probablement par manque de courage.
Duras, dont Bulle dit ailleurs (p. 142) « Notre amitié s’était tissée sur le plus commun de la vie, il n’y a rien de plus passionnant que les choses sans intérêt. Marguerite se concentrait toujours intensément pour exprimer des choses tout à fait banales » et il me semble que c’est un bel hommage alors que d’autres y verraient peut-être une moquerie.
Moi aussi j’aimerais parfois avoir le courage de ne rien faire. Mais c’est plus fort que moi, je fais. J’ai la chance d’être en paix relative avec mon prénom : Fabrice c’est celui qui fait, Homo Faber, « nomen est omen » allons-y.
À mon âge on finit par avoir une vague idée de qui l’on est : je suis un fainéant contrarié.
Alors je fais des trucs. Une masse de trucs. Pas un jour sans un truc. J’ai tellement de trucs à faire que j’annonce ici-même, avec effet immédiat, un nouveau sevrage de Facebook, pour une durée indéterminée, pardon, ces jours-ci j’ai trop de trucs à faire pour guetter les trucs faits par les autres. Je prends congé en postant ci-dessous la réclame d’un autre truc que je ferai bientôt : le prochain stage de création de chansons avec Marie Mazille se tiendra les 14-15 juin à Solexine (merci Véronique Stouls pour la com).
Salut !

Mirliton Matin : des animaux et des hommes (M.M., vol. 5)

12/04/2025 Aucun commentaire

Épisodes précédents : ici.

Mirliton Matin, le seul quotidien du matin qui paraît parfois le soir parfois la nuit et parfois jamais, bref qui fait comme il lui chante et c’est le cas de le dire !

Rappel du principe général : ma camarade de jeu Marie Mazille me propose un sujet, la plupart du temps sous la forme d’une coupure de presse idiote, d’un fait divers atroce ou d’une information scientifique absurde.
Je me retrousse les manches et je mirlitonne illico, parce que la vie est plus belle quand elle est versifiée, toutes les vies, même cette vie-là, idiote, atroce ou absurde.
Comme dans les improvisations théâtrales ou les jeux de clown, je n’ai pas le droit de refuser un sujet que Marie me donne. Je ne l’ai jamais fait. Quand faut y aller, j’y vais.

I

Et c’est reparti pour de nouvelles perspectives professionnelles d’avenir, grâce à notre rubrique Je traverse la rue et je te trouve un job, Découvre les métiers innovants en tension (1) !

Aujourd’hui : le sexeur de poussin, chargé de palper les oisillons, quand ils sont tout neufs, qu’ils sortent de l’oeuf, du cocon. Par les soins du sexeur, les femelles seront soigneusement mises de côté et feront d’excellentes pondeuses en batterie puisqu’elles sont bonnes à ça ; les mâles inutiles seront impitoyablement exterminés. (Merci, Marie, hein)

Les règles de versification s’imposent ici d’elles-mêmes, extrapolées par le contexte et le tri par genre : deux rimes seulement, l’une féminine et l’autre masculine, évidemment alternées.
Comme rime masculine je choisis -sin (induite par « poussin« ), comme rime féminine je choisis -ïde (induite par « ovoïde » puisque je ne peux choisir « oeuf« , qui serait une autre rime masculine). Et puis des alexandrins, pour l’impression de foultitude piaillante et parce que les oeufs sont vendus par douze.

Tu rêves de venger tous les féminicides ?
Dès qu’un mâle surgit, te voilà assassin ?
Contre quiconque émet des spermatozoïdes,
Devant ces gros relous et leurs gestes malsains,
Te viennent des pulsions d’agression homicide ?
Mais tu n’es que bonté pour les paires de seins…
Que longanimité pour qui devient gravide…
Tu souhaites préserver quiconque tombe enceint…
J’ai un tuyau pour toi si tu n’es pas timide !
Une vraie profession répond à tes desseins,
La discrimination t’y servira de guide :
Choisis le beau métier de sexeur de poussins !
Tu apprendras à distinguer d’un oeil rapide
Le bon grain de l’ivraie parmi le jaune essaim :
Les femelles sauvées, pondeuses d’ovoïdes,
Pourvues d’un merveilleux utérus sacro-saint,
Et les mâles maudits qu’on dissout dans l’acide !
À la mort du viril, que sonne le tocsin !

II

Mirliton Matin, rubrique Je traverse la rue et je te trouve un job, Découvre les métiers innovants en tension (2) !
Aujourd’hui : Claire, la sirène d’eau douce.
(décasyllabes, monorime en -aire)

Ondulant tel un poisson dans l’eau claire
En liquide elle a choisi sa carrière
Quoique très loin des vagues, des rivières
Des courants, de l’écume, de Cythère…
Un parc à thème est son embarcadère
L’aquarium est une cage de verre
Où, blonde créature imaginaire
Elle naît d’un rêve, vivante chimère !
Le chlore a remplacé le sel de mer
Nécessitant quelques soins oculaires
Prix à payer pour l’être légendaire
Qui chaque minute émerge et aspire l’air
La sirène municipale est fière
Nageant entre deux eaux, selon horaires,
Dans sa queue d’écaille aux reflets bleus-verts
En chair et en arête, en polymère,
Elle offre son ballet spectaculaire
À chaque enfant, à sa mère, et son père
(Qui se demande où est passé son derrière
Ou comment suspendre sa jarretière)
Ondulant tel un poisson dans l’eau : Claire.

III

Mirliton Matin, rubrique Nos animaux les bêtes (1) !
L’oiseau Fée des neiges, trop mignon.
(Hexasyllabe, ce qui est bien suffisant pour le tout petit animal, deux rimes.)

Frêle boule de plumes
Délicat privilège
Elle naît de la brume
S’élève en son manège
S’envole en son costume
Que la blancheur allège

Son infime volume
Peut-être la protège
Des coups de froid, des rhumes
Nature en florilège
La glace fond et fume
Enfin se désagrège

Mais l’espoir se rallume
La vie, ses sortilèges
En elle se résument :
Elle est la fée des neige.

IV

Mirliton Matin, rubrique Nos animaux les bêtes (2) !
La nature qui a plus d’imagination que nous n’invente pas que des créatures trop choupi craquantes doudous, telles les fées des neiges. Elle invente aussi des vilaines brutes avec des trognes à coucher dehors, et mauvaises, avec ça. Aujourd’hui : la lamproie.
(Octosyllabes, deux rimes fém./masc.)

Halte au délit de sale gueule !
Vrai, elle est moche la lamproie
Elle est moins beau qu’un épagneul
Elle est moins sympa qu’un anchois
On aimerait la laisser seule
Et cruelle avec ça, sournois
Vampire odieux, prédateur veule
Elle est sans pitié pour ses proies
Et les couvre comme un linceul…
Mais elle est comme toi et moi !
Nous avons un commun aïeul !
Son examen est adéquat
Pour parachever le puzzle
De notre cerveau. Tu le crois ? 

Ce qu’ils ont fait de l’écologie

01/04/2025 Aucun commentaire
D'argent et de sang de Xavier Giannoli, Frédéric Planchon (2023) - Unifrance

Une série télévisée ordinaire, donc médiocre, a pour effet, peut-être même pour fonction, de vous avachir, de vous écraser sans pitié au fond du canapé, cerveau en veille, dans l’attente que votre vie passe au fil des saisons. Servitude volontaire, anesthésie nerveuse et divertissement pascalien. Cette apathie physique, intellectuelle et civique devant l’écran constitue un tel standard industriel qu’il ne faudrait forcer qu’un tout petit peu sur le complotisme pour envisager qu’elle profite à quelqu’un ou à quelque chose.

En revanche, une série télévisée d’exception se reconnaît au réveil qu’elle fait sonner en nous, alarme !, alarme !, à la pulsion qu’elle fait naître, à l’injonction de se lever séance tenante, de hurler sa rage, sa colère, son indignation ou son écoeurement, de quitter son canap, de sortir dans la rue foutre le feu, pendre les banquiers avec les tripes des législateurs et faire enfin la révolution.
D’argent et de sang, par Xavier Giannoli, est une série d’exception.

Série produite, filmée et montée à l’américaine – naturellement par là je veux dire, non à la Donald Trump, mais à la David Simon : un art de la narration, de l’idée incarnée, de la longue durée qui mise sur l’intelligence du spectateur, et le choix d’un sujet, d’un fil rouge, d’un phénomène global (chez David Simon, par exemple : le trafic de drogue) qui traverse toutes les couches de la société comme autant de cadres romanesques, avec vue en coupe des causes, des effets, et, oui, pour le coup, c’est bien ça, de l’argent, et du sang.

Mais série avant tout prodigieusement pédagogique.
Citoyenne, pour ainsi dire.
Grâce à elle, enfin on entrave quelque chose à la fabuleuse fraude à la TVA carbone, aux machineries et machinations de l’arnaque du siècle qui entre 2008 et 2009 a fait partir en fumée 6 milliards d’euros en Europe, dont 1,6 aux frais de l’État français, tes impôts et les miens.

C’est ce mélange de deux énergies, celle du film d’action implacable avec personnages solides et casting au poil, et celle du lent didactisme politique, qui donne envie de la faire, la putain de révolution.
La source de cette série archi-documentée n’est pas un roman mais une enquête parue sous le même titre, signée Fabrice Arfi, le même admirable journaliste-pédagogue-héros-lanceur d’alerte grâce à qui se tient ces jours-ci le procès de Nicolas Sarkozy, aigrefin président qui finança sa campagne électorale grâce aux dessous de tables d’un dictateur. Merci Fabrice Arfi. Heureusement qu’il y a des gens qui bossent en France.

Giannoli a réalisé cette série d’auteur (le cliché facile voudrait que ce n’est pas une série mais un film de dix heures) auréolé du succès d’Illusions perdues, film certes éminemment politique. Pour ma part j’ai beaucoup repensé à un de ses précédents films, plus modeste mais, à sa mesure, très impressionnant : À l’origine avec François Cluzet, déjà l’histoire d’un escroc et de l’effet que ses tromperies avaient sur une communauté. Mais, alors, le magouilleur était touchant, piégé dans son piège, pris dans sa mythomanie comme dans un rêve (cf. aussi Marguerite du même Giannoli, autre variation sur une dingue hors sol mais relativement inoffensive, dont le délire était pittoresque, attendrissant, contagieux). Avec la bande organisée des margoulins du carbone, on atteint toutefois une toute autre dimension dans l’obscénité, dans le cynisme, dans l’appât du gain, dans la gabegie, dans le laissez-faire-laissez-passer, pendant que notre maison brûle, comme disait l’autre, qui n’était pas le dernier des hypocrites.

Le message essentiel, la leçon que l’on retient après le générique de fin ?
Voilà ce qu’ils ont fait de l’écologie : un marché.
Un marché libre et non faussé, béni par l’Union européenne et par tous les chantres du libéralisme sans frein, sans foi ni loi, sans pays ni contrôle.
Une libre entreprise.
Une bourse.
Une place financière.
Une bonne affaire.
Le marché : pensée unique, main invisible, et réciproquement.
La taxe carbone, le droit à polluer monnayé, devient une opportunité financière à ne pas louper, une invitation à se goinfrer, et non une sanction raisonnée, un impératif de survie collective, une urgence pour sauver la vie sur terre. Étonnez-vous que le marché attire les escrocs, que le marché tourne mal. Sacra auri fames et suicide global, argent roi et destruction de la vie.

Ce qu’ils ont fait de l’écologie ? Mais qui, ils, à la fin ?
Allez, on balance. Vincent Lindon balance.
Dans l’avant-dernier épisode, le personnage joué par Lindon, tenace et marmoréen chef du Service National de Douane Judiciaire (personnage fictif mais synthèse de plusieurs enquêteurs et, au passage, bis repetita : heureusement qu’il y a des gens qui bossent en France) entend l’un des suspects qu’il a mis sur écoute parler de lui : C’est un malade, il en veut à la terre entière. Il se lance dans un monologue extraordinaire, qui explicite ce qu’est la terre entière, qui énumère les responsables du plus infime magouilleur des rues aux plus puissants politiques des ministères, petites frappes de Belleville, grands bourgeois du 16e, en passant par tous les corrompus, tous les ignorants que l’ignorance arrange, tous les traders et brokers et gérants de paille, une longue chaîne de complicités, entre ceux qui votent des lois béantes de failles et ceux qui s’y engouffrent un continuum de vulgarité matérialiste et irresponsable. Éructant calmement, Lindon fait précéder chaque maillon, chaque catégorie de coupables, par la formule J’en veux à… Ce martèlement par anaphore est aussi puissant et aussi édifiant qu’une autre énumération, célèbre, qui, j’en suis certain, a servi de modèle littéraire à Giannoli : J’accuse de Zola. Étudie-t-on encore au collège, comme lorsque j’étais collégien, le J’accuse de Zola ? M’étonnerait. On devrait. On devrait aussi étudier le J’en veux à… de Giannoli. On devrait tant de choses. On devrait faire la révolution, tant qu’on y est.

Un des bienfaits collatéraux de la série est la découverte (pour moi) de l’imparable chanson du générique, N.E.M., conçue étonnamment six ans plus tôt mais qui lui va comme un gant sur mesure, énergie synchrone. Chanson signée Las Aves, un groupe toulousain qui sonne comme le Bronx. Concept innovant : toulousonx. C’est en mélangeant qu’on invente.

Sur le même hallucinant sujet de la fraude à la TVA carbone, le toujours imprévisible et versatile Guillaume Nicloux avait quant à lui réalisé un documentaire, Les rois de l’arnaque (sur Netflix), où l’on découvrait les véritables noms et visages des protagonistes d’Argent et de sang. Ainsi, Alain Fitoussi, dit Fitouss l’ Élégant, incarné avec brio dans la série par Ramzy Bedia, s’appelle en réalité Mardoché Mouly, dit Marco l’Élégant. Or Mouly est encore plus vedette, encore plus filou, mytho, grande gueule, éhonté et charismatique que Fitoussi. Mouly, le vrai, a même écrit une chanson bling-bling où il vante ses exploits. Giannoli n’a pas osé évoquer cette chanson dans sa série, et on le comprend, elle n’aurait pas été crédible. On découvre pourtant que certaines des anecdotes les plus outrancières et glaçantes de la série (la banane avec la peau…) sont bel et bien authentiques.
Même si le film de Nicloux (2021) précède de deux ans la série de Giannoli (2023-2024), je recommande de les regarder dans le même ordre que moi, fiction d’abord, doc ensuite, histoire de vérifier l’adage, la vérité dépasse la fiction.

Au-delà de l’adage, ce qui est terrible avec la réalité c’est surtout qu’elle n’a pas de générique de fin. Derniers rebondissement en date : Arnaud Mimran (« Jérôme Attias » dans la série) sera jugé pour trois morts parmi ses proches ; Marco Mouly s’est de nouveau fait arrêter dimanche 30 mars 2025 à Rome, à sa descente d’avion, notamment pour ne pas avoir déclaré les droits d’auteur de son autobiographie !

Chacun sa chanson

27/03/2025 Aucun commentaire

Photo de famille : la dream-team du week-end dernier. De gauche à droite : Véronique Stouls, Denis Chatroux, Mali Billiau, Valda Daligand, un type chelou en sweat à capuche, Marie Mazille, Helene Hirtz, Claire Guy, Laetitia Plançon, Chantal Bouziat.
Encore un magnifique stage de création de chansons, joyeux et fertile, encadré par MMMM (Marie Mazille et moi-même).
Neuf stagiaires au total (l’un a dû s’éclipser avant l’heure de la photographie).
Soit neuf imaginaires à accompagner, neuf univers intérieurs à explorer ou ré-explorer sans relâche, neuf idées précises ou vagues, à sculpter par les mots et par la musique. Neuf improvisations dirigées. Neuf progressions, d’où que l’on parte.
Et, à la fin du week-end : neuf chansons.
Le miracle s’accomplit à chaque fois. Pas d’erreur, malgré la régularité qui le rend prévisible, il s’agit bel et bien d’un miracle, nous n’en sommes pas blasés.
D’ailleurs, nous pouvons d’ores et déjà révéler la date du prochain miracle : il aura lieu le week-end des 14 et 15 juin 2025 à Solexine, Grenoble.
Contrairement à ce que nous avions imprudemment annoncé, faute de trouver un créneau commun en croisant trois agendas chargés, CE NE SERA PAS un stage en trio, avec session d’enregistrement aux bons soins de Patrick Reboud… mais un « simple » stage en duo, même miracle ordinaire que le précédent.
Bien à vous et à bientôt,
MMMM.

(Les détails à l’adresse habituelle : https://www.fonddutiroir.com/blog/?page_id=17801)


Chacun de nos stages de création de chansons se concrétise par un certain nombre de titres, l’équivalent d’un EP voire d’un LP. Je veux dire : un extended play ou un long play, oui, pardon, je cause comme on causait au XXe siècle, lorsque la musique se consommait par albums conçus par les artistes plutôt que par flots de titres enchaînés par les algorithmes.Une fois ces chansons enregistrées dans des conditions professionnelles (merci Patrick Reboud), elles sont postées sur Soundcloud (merci Mali Billiau).
Certes, avec pas mal de retard, puisque la fournée publiée aujourd’hui même met en valeur des chansons créées il y a deux ou trois stages… mais peu importe, le résultat est là, bel accomplissement pour nos chantistes, et superbe carte de visite pour Marie Mazille et moi :
https://soundcloud.com/mariemazille-861880613
On découvrira dans cette cuvée, aussi hétéroclite que les autres, dix chansons (un album, vous dis-je) :

Le vrai Cularo puis Buralist song, deux chroniques urbaines avec supplément de gouaille dauphinoise, par Caroline Sebaibi ;
Recueil, poignante visite d’un garde-meuble comme on ouvre un album de famille ; puis Drôle de décor, prière athée, par Chantal Bouziat ;
Brutal, récit d’une tragédie et d’un traumatisme, comme son nom l’indique pudiquement ; puis Page d’écriture, discours de la méthode, c’est-à-dire deux facettes de Véronique Stouls (qui est une fille marrante, mais pas que) ;
Le bureau des souvenirs perdus, délicieuse fantaisie fleuve qui pourrait aussi bien être une nouvelle fantastique mais qui a bien raison d’être plutôt une chanson, par Mali Billiau ;
D’un sort malin, récit d’un fait divers paysan rendu à la fois hermétique, légendaire et universel par la grâce de la pure poésie, par Valda Daligand ;
Le plein de ta peau, déclaration d’amour épidermique et maritime, et mes fesses tu les aimes mes fesses, par Sylvie Reghezza ;
– Et puis bien sûr la chanson collective pour conclure cet album-ci, car où en serions-nous sans collectif : Jaloux, une java qui pose les vraies questions : « Où est l’amour ? Entre quatre mours ! Où est ma mère ? Qui m’exaspère« , etc.

Matrimoine

20/03/2025 Aucun commentaire

Il est toujours bon de s’aérer les neurones, fût-ce dans l’air méphitique de la capitale, et je reviens remonté comme une pendule de deux jours à Paris où j’ai assisté au congrès annuel des bibliothécaires musicaux organisé par l’excellente ACIM.

Outre des visites guidées dans des fonds merveilleux voire mythiques : la BNF, la Médiathèque Musicale de Paris sise aux Halles ou encore la discothèque de Radio France (hallucinante caverne d’Ali Baba)… les débats et tables rondes étaient fort stimulants quoique sur un sujet peu neuf (c’était déjà celui des RNBM 2017), mais toujours vibrant d’actualité en notre époque de destructions tous azimuts : le patrimoine.

Je retiens particulièrement la conférence inaugurale, passionnante. L’intervenante, Claire Bodin, directrice de festival et conceptrice de la base de données « Demandez à Clara » consacrée exclusivement aux compositrices, a mis les pieds dans le plat direct :

« Vous programmez deux jours consacrés au patrimoine, d’accord, merci, mais quid du matrimoine ? »

(ce dernier mot est souligné en rouge par mon correcteur d’orthographe, c’est dire.) La provocation est savoureuse, adressée à un parterre de professionnels s’ébrouant, selon les termes de leur cadre d’emploi, dans « les bibliothèques et le patrimoine ». Que conserve-t-on, au juste, que transmet-on et que néglige-t-on ? Examen de conscience : nous autres gardiens du patrimoine sommes-nous gardiens du patriarcat ?

« Matrimoine n’est pourtant pas un néologisme, mais de même que « autrice » il disparaît au XVIe siècle par la faute de ces messieurs de l’Académie française, qui considéraient qu’on ne recevait un héritage que de son père, en aucun cas de sa mère ! Car de la mère, et des femmes, on ne reçoit que des choses accessoires et sans valeur… »

Témoin de l’antériorité du substantif matrimoine, l’adjectif qui en découle est resté en usage : matrimonial. Soit : relatif au mariage. Puisque les femmes ne sont bonnes qu’à ça, à se marier et faire des gosses, merci la dot. Tandis que patrimonial, c’est du solide, du sérieux, pas de la bagatelle mais de la valeur, tous sens du terme. Les hommes, peut-être par archaïque jalousie de la gestation, ont toujours eu tendance à dénier aux femmes un autre pouvoir créateur que celui-ci : assignation à être génitrices et jamais génies (c’était le sujet d’un des tout premiers articles substantiels au Fond du Tiroir en 2007).

Sans matrimoine, sans l’idée même du matrimoine, pas d’héritage venu des femmes, pas de traces, pas de legs, pas d’œuvres conservées, nulle artiste femelle au panthéon, et ainsi des siècles de musiques écrites par les femmes ont été invisibilisés, jusqu’à se demander si ces femmes et ces musiques ont réellement existé – le doute est permis et alimente perversement l’idée reçue : les grandes compositrices n’existent pas, CQFD. On le sait, les « grands artistes » sont tous des hommes, en musique comme ailleurs.

Pourquoi avoir baptisé cette base de données Demandez à Clara ? Parce que Clara savait :

« Quand je ne serai plus, alors tout sera oublié de mon apport à l’art. » (Clara Schumann, tragiquement lucide, épouse de Robert et compositrice aussi géniale que lui mais à l’ombre de son mari.)

Maddalena Casulana (1535-1590) dédie ainsi son premier livre de madrigaux à Isabelle de Medicis :

« Je souhaiterais [révéler] aussi au monde (pour autant que cela me soit permis dans la profession de la musique) la vaine erreur des hommes, qui se croient maîtres des dons de l’intellect au point qu’il leur semble impossible de partager ces derniers avec les femmes. »

Ces références à elles toutes seules méritaient le voyage. Si le cœur vous en dit la conférence de Claire Bodin est déjà sur Youtube.

Déjà 5 ans de « monde d’après ». Et après ?

16/03/2025 Aucun commentaire

16 mars 2020 : à cinq ans d’ici, jour pour jour, Emmanuel Macron déclarait dans le poste « Nous sommes en guerre » afin de justifier le confinement national. Ce discours guerrier est documenté au 70e couplet de la chanson-fleuve Au premier jour de la Confine, explicitement créée pour servir l’écriture de l’Histoire. (Cinq ans plus tard nous ne sommes plus confinés mais, par ailleurs, presque en guerre. Il a fini par l’avoir, Manu, sa guerre littérale qui élève l’homme d’État ! République en Marche ! Marchons ! Marchons ! Qu’un sang impur !)

Flashback : au printemps 2020 quatre artistes confinés, Marie Mazille, Capucine Mazille, Franck Argentier et Fabrice Vigne se lançaient dans cette interminable ritournelle pour conjurer l’interminable confinement, l’ennui et l’angoisse. Ce témoignage burlesque et poétique est presque entièrement visible sur Youtube – quant à la véritable intégrale, sous forme d’un élégant livre-DVD, elle est toujours disponible sur commande au Fond du Tiroir.

Ici, la présentation Ulule périmée mais perpétuellement réjouissante.

L’art du rébus est difficile

10/03/2025 Aucun commentaire
Peut être un graphique de 1 personne et texte

J’ai publié sur les rézos le rébus ci-dessus, en spécifiant Une maxime à trouver, attribuée à Philippe Néricault Destouches (1680-1754).

Quelques personnes ont percé l’énigme, ce qui m’a conduit à estimer que Je ce rébus-ci était niveau débutant, tandis que le précédent publié du Fond du Tiroir, niveau expert, n’avait été décrypté par personne.

Mais j’ai eu un remords : mon rébus ne respectait point l’alexandrin originel, amputé d’un pied. Comme je ne saurais souffrir qu’on me reprochât un manque de respect envers l’alexandrin, j’ai rapidement revu ma copie. Voici la version 2, format paysage, pour changer :

Peut être un graphique de 1 personne, niveau, plan et texte

Vient l’heure de la solution.
Version 1 (fautive, au temps pour moi) : Lac Riz Ticket Thésée Mail Hardy [Oliver] Fissile.
Version 2 (respectant l’alexandrin originel) : Lac Riz Ticket Thésée Mail-art Eddy [Constantine] Fissile.
Cette célébrissime citation est extraite de la comédie Le Glorieux de Philippe Néricault Destouches (1709).
Voici l’extrait intégral, que j’ai été tenté de traduire in extenso sous forme de rébus (comme Philippe Vuillemin fit avec La Recherche du temps perdu) avant de me souvenir brusquement que j’avais autre chose à faire :

ISABELLE, à Philinte : Qu’y désapprouvez-vous ? Les vers ou la musique
PHILINTE : Je sais peu de musique et fais de méchants vers,
Ainsi j’en pourrais bien juger tout de travers.
Et d’ailleurs j’avouerai qu’au plus mauvais ouvrage
Bien souvent, malgré moi, je donne mon suffrage.
Un auteur, quel qu’il soit, me paraît mériter
Qu’aux efforts qu’il a faits on daigne se prêter.
LISETTE : Mais on dit qu’aux auteurs la critique est utile.
PHILINTE : La critique est aisée et l’art est difficile.
C’est là ce qui produit ce peuple de censeurs,
Et ce qui rétrécit les talents des auteurs.

Ne pas confondre Tarif et Tariff

09/03/2025 Aucun commentaire

Prochain stage de création de chansons assuré (et faut voir comment) par Marie Mazille & Fabrice Vigne : les 22-23 mars 2025, à Solexine, Grenoble.
Comme l’échéance est dans 15 jours, il est grand temps de relever le compteur : restent non pas mille non pas cent non pas dix places vacantes, mais DEUX. Figurez-vous qu’on ne vend pas ces deux ultimes aux enchères, elles restent au même tarif dérisoire que les autres : 160 euros le week-end.
Merci à Véronique Stouls qui nous a concocté l’attrayant support de com ci-dessus. Les autres détails à retrouver au Fond du Tiroir.

J’annonce les tarifs de notre stage et brusquement je découvre le dernier trumpisme à la con : le fou dangereux orange et blond vient de déclarer “tariff is the most beautiful word in the dictionary”. Comme je refuse d’avoir quoi que ce soit en commun avec ce type (à part à la rigueur les organes de base équipant un être humain), et certainement pas un mot fétiche, je m’indigne, m’ulcère et objecte qu’il existe des centaines de milliers de mots plus beaux que tarif. Figurine. Ombilical. Geyser. Confidentiel. Projectile. Relief. Graminée. Couleuvre. Iceberg. Chenil. Bronches. Kangourou. Agrafe. Collision. Marguerite. Pécamineux. Crocus. Tremblement. Acrobatie. Lénifiant. Et combien d’autres. Je me demande si tous les mots du dictionnaire ne seraient pas sensiblement plus beaux que Tarif.

Bref, pour jouer avec plein de jolis mots, rendez-vous le 22 mars. Is there Life on Mars ? Ben oui ! (Message subliminal : vive David Bowie, à bas Elon Musk.)


Un petit jeu, en avant première.

Comme nous avons systématiquement un bon taux de redoublants (triplants quadruplants ad lib.) Marie et moi tâchons de renouveler en permanence le répertoire d’exercices que nous confions à nos stagiaires. En voici un inédit, que nous venons d’inventer. Nous avons choisi une chanson très inconnue d’un chansonnier très connu (je n’en dirai pas davantage), et en avons prélevé tous les mots clefs : Pluie, Venir, Nuages, Mon gars, Avancer, Croche-patte, Chemin, Long, Main, Chanter, Copains, Girouette.

Il vous reste à écrire une chanson nouvelle en incluant ces mots-là. Dernière étape : comparer le résultat avec l’original peut s’avérer amusant.
Si vous n’êtes pas présent avec nous ce week-end (tant pis pour vous) vous avez le droit de jouer chez vous.

Comme il est tout-à-fait inconvenant et contraire à l’éthique de donner une consigne qu’on n’a pas au préalable suivie soi-même, je me plie illico à l’exercice. J’écris ceci, en quintils monorimes, anaphores et alexandrins (je le précise pour qui serait déjà versé dans le vocabulaire technique) :

Le nuage est si grand que le ciel est caché
Le nuage est si long qu’on ne peut l’empêcher
Le nuage est si bas qu’on pourrait le toucher
Le nuage est si lourd… et la pluie est lâchée
Sous le ciel océan, mon gars, il faut marcher !

Chaque goutte te frappe jusqu’à t’écorcher
Chaque goutte te vise à la main d’un archer
Chaque goutte te cogne en caillou en rocher
Chaque goutte léchée crachée torchée douchée
Sous le ciel océan, mon gars, il faut marcher !

Horizon renversé, girouette perchée
Horizon sans chemin sans plafond ni plancher
Horizon sans chanter sans copain sans clocher
Horizon croche-patte à travers la drachée
Sous le ciel océan, mon gars, il faut marcher !

Un jour viendra peut-être un jour sans trébucher
Un jour viendra et un toit pour te retrancher
Un jour viendra et un abri pour te sécher
En attentant ce jour, avance sans flancher.
Sous le ciel océan, mon gars, il faut marcher !

« Il faudrait essayer d’être heureux ne serait-ce que pour donner l’exemple » (Jacques Prévert)

02/03/2025 Aucun commentaire

Carte postale Le Fond du Tiroir !

Je me trouve, à pied et par hasard, à chercher mon chemin dans les ruelles de l’une des plus petites préfectures de France, Digne-Les-Bains (Alpes-de-Haute-Provence, ex Basses-Alpes).

Je remonte, toujours par hasard, la rue de l’Hubac lorsque soudain, au n°47, je tombe nez à nez avec une plaque m’informant qu’ici vécut l’évêque De Miollis, que Victor Hugo prit pour modèle en écrivant Monseigneur Myriel dans Les Misérables.

J’en suis bouleversé comme si je découvrais accidentellement l’authentique lieu natal de quelque héros. Ulysse, D’Artagnan, Jean Moulin, Spider-Man, Paul Watson ou Greta Thunberg, ce calibre, pas moins.

Monseigneur Myriel est introduit dans une séquence qui fonde à la fois l’incomparable roman-fleuve (dont le tout premier paragraphe, le fil qui dépasse et s’apprête à dévider toute la bobine, est : « En 1815, M. Charles-François-Bienvenu Myriel était évêque de Digne. C’était un vieillard d’environ soixante-quinze ans ; il occupait le siége de Digne depuis 1806. »), bien des consciences politiques dont la mienne, et diverses théories éducatives.

Myriel est « Un juste » (titre du livre premier) qui donne sa confiance à Jean Valjean et lui montre, par l’exemple et sans prêchi-prêcha, que le bien est possible. La bonté advient si la bonté est possible, et la bonté est possible aussitôt qu’un geste de bonté prouve qu’elle est possible. Elle est non seulement possible, mais elle est là, entre toi et moi, et maintenant à toi de jouer, non non, c’est à toi, tu peux garder les chandeliers, tu les avais oubliés.

Considérer que son interlocuteur est bon le rend bon (inversement, considérer qu’il est mauvais le rend mauvais – et ad libitum on peut remplacer « bon » ou « mauvais » par ce qu’on voudra, « intelligent » ou « stupide », « généreux » ou « égoïste », le paradigme s’appliquera).

Je me trouve devant le 47 rue de l’Hubac à Digne (quel nom de ville prédestiné, au fait) et je suis ému, presqu’aux larmes, comme si j’avais devant moi le nombril du monde, le centre natif de tout espoir possible.

Au cul les tristes sires et les fauteurs de guerre, Trump, Musk, Poutine, Bardella ! Vos gueules puisque la bonté est possible !

Je m’ébroue pour ne pas céder à l’angélisme mou, et plutôt que de citer Mgr Myriel, j’ai envie de donner ici un poème d’un autre natif des ex-Basses-Alpes, le poète Lucien Jacques, pote et par certains aspects Doppelgänger de Jean Giono :

CREDO

Je crois en l’homme, cette ordure.
Je crois en l’homme, ce fumier,
Ce sable mouvant, cette eau morte.
Je crois en l’homme, ce tordu,
Cette vessie de vanité.
Je crois en l’homme, cette pommade,
Ce grelot, cette plume au vent,
Ce boute feu, ce fouille-merde.
Je crois en l’homme, ce lèche-sang.

Malgré tout ce qu’il a pu faire
De mortel et d’irréparable.
Je crois en lui
Pour la sureté de sa main,
Pour son goût de la liberté,
Pour le jeu de sa fantaisie

Pour son vertige devant l’étoile.
Je crois en lui
Pour le sel de son amitié,
Pour l’eau de ses yeux, pour son rire,
Pour son élan et ses faiblesses.

Je crois à tout jamais en lui
Pour une main qui s’est tendue.
Pour un regard qui s’est offert.
Et puis surtout et avant tout
Pour le simple accueil d’un berger.

Théo et Tao

10/02/2025 Aucun commentaire

Aujourd’hui avec ma camarade Marie Mazille : journée de travail un peu pleine.
Six ateliers d’écriture de chansons dans les six classes d’une école élémentaire = six chansons créées.
Le rythme est trop stakhanoviste à mon goût et au crépuscule quelques-uns de mes neurones ont fondu, mais peu importe, comme toujours lorsqu’il s’agit de création, seul le résultat compte.
Le résultat cogne dur.
Le thème général imposé était le tour du monde et les droits des enfants. La dernière classe de la journée, un CM2, a choisi de travailler sur la Chine… Comme j’objectais que la Chine était un trop grand pays pour être traité en une seule fois et qu’il faudrait cibler davantage le propos, au fil de la conversation le thème de la chanson s’est précisé, s’est même radicalisé. Nous en avons fait un petit tract anti-capitalisme et anti-globalisation. Hé ben dis donc ! Ils sont bien, ces petits. Vive l’avenir, finalement.

THÉO ET TAO

Tu t’appelles Tao
T’as pas eu de pot
Douze ans, à l’usine
Tu es né en Chine
Travaille dans le noir
Du matin au soir
Fabriquer t-shirt
Fabriquer t-shirt
Fabriquer t-shirt
… Et livrer t-shirt
Qui part en cargo
Qui casse ton dos
Au suivant !

Tu t’appelles Théo
Toi t’as eu du bol
Douze ans, à l’école
Et à faire le beau
Pour le karaté
Ou pour la soirée
Acheter t-shirt
Acheter t-shirt
Acheter t-shirt
… Et jeter t-shirt
Qui t’a rendu beau
Qui t’a fait héros
Au suivant !

Théo et Tao
Sont dans un bateau
Un seul tombe à l’eau
Théo et Tao
Sont dans un t-shirt
Le monde les heurte